Les défaillances en France toujours à un niveau historique en 2014
La dernière étude d’Euler Hermes révèle que la croissance économique (+ 0,4% en 2014 et + 0,8% en 2015) est insuffisante pour inverser la courbe des défaillances, toujours très élevées (63 400 en 2014 et 2015), qu’une région française sur deux connaît une nouvelle augmentation des défaillances et que neuf entreprises sur dix entrées en procédure collective finissent en liquidation judiciaire.
Spécialiste mondial en assurance-crédit, Euler Hermes livre un état des lieux complet des défaillances d’entreprise en France en 2014.
La trop faible croissance en France ne permet pas encore une stabilisation des défaillances
Avec + 0,4%, la France affiche un taux de croissance inférieur à 1 % pour la troisième année consécutive – du jamais vu depuis l’après-guerre. La consommation des ménages reste atone et l’investissement se contracte depuis mi-2011 (11 baisses sur les 13 derniers trimestres). Une légère amélioration est cependant attendue en 2015. La croissance serait de + 0,8%, notamment grâce à un rebond mécanique de l’investissement des entreprises et un léger regain de dynamisme du commerce extérieur, reposant essentiellement sur un scénario de baisse durable de l’euro.
Pour autant, cette éclaircie ne sera pas suffisante pour inverser l’évolution des défaillances : les observations sur une longue période montrent qu’il faut en moyenne + 1,7 % de croissance du PIB pour enclencher un véritable reflux des défaillances. Ainsi, les défaillances continueront d’augmenter en 2014 (+ 1 %) et atteindront même un nouveau record en volume, dépassant les sommets de la crise : 63 400 défaillances attendues en 2014 et également en 2015, contre 62 714 en 2009.
A l’export, la situation connait une légère embellie : après + 5 % d’augmentation en 2013, l’indice de défaillances à l’export (IDEX) d’Euler Hermes devrait afficher une baisse du risque de - 15 % en 2014 et de - 3 % en 2015, principalement tirée par la sortie de récession d’importantes économies comme l’Espagne. « Les perspectives à l’export sont favorables pour les entreprises françaises, analyse Maxime Lemerle, responsable des études chez Euler, mais elles devront rester vigilantes : de nombreux pays sont toujours marqués par un fort risque d’impayé à l’horizon 2015. Chez nos principaux partenaires commerciaux, la sinistralité sera encore supérieure de 60 % à son niveau d’avant-crise (moyenne 2003-2007). En Italie, les défaillances ont augmenté de + 10 %, et au Brésil de + 4 % en 2014. »
La sinistralité sur les grandes entreprises reste élevée
Les PME (avec un chiffre d’affaires entre 250 000 et 2 millions d’euros) restent soumises à une forte hausse des défaillances : + 3,7 % en 2014, après déjà + 7,2 % en 2013 et + 6,4 % en 2012. Elles représentent 21 % des défaillances en France – soit plus de 13 000 entreprises par an. Une amélioration s’amorçait début 2014 pour les plus grandes entreprises (plus de 15 millions d’euros de chiffre d’affaires), mais les défaillances repartent à la hausse depuis le printemps. Sur les douze derniers mois (à fin septembre), plus de 180 grandes entreprises ont fait défaut, un volume toujours très élevé et en augmentation régulière depuis dix ans. « Les défaillances des grandes entreprises représentent un chiffre d’affaires cumulé de 8,9 milliards d’euros et un poste fournisseur cumulé de 1 milliard d’euros, souligne Nicolas Delzant, président du comité exécutif d’Euler Hermes France. Le ralentissement de la consommation des ménages, face à une forte tension sur les prix et des marges déjà réduites, ont eu raison d’une trésorerie déjà affaiblie depuis plusieurs années. »
Une région française sur deux connaît une hausse des défaillances sur les douze derniers mois
Les défaillances connaissent en 2014 une hausse supérieure à 1 % dans la moitié des régions, avec une progression supérieure à + 6 % dans trois d’entre-elles : la Corse, la Haute-Normandie et le Limousin. Globalement, les défaillances restent très élevées en volume sur l’ensemble du territoire, y compris dans les régions où la tendance est plus favorable. Ainsi, si la Picardie affiche une baisse des défaillances de - 7 % sur les douze derniers mois, elle enregistre un niveau de sinistralité d’entreprises supérieur de 12 % à celui de 2009, dernier pic observé. Au total, quinze régions continuent d’afficher des volumes de défaillances supérieurs à ceux de 2009, avec un bilan particulièrement défavorable en Haute-Normandie (+ 24 %) et en Champagne-Ardenne (+ 11 %).
Ce phénomène atteint aussi la région Ile-de-France (+ 2,5 % sur les douze derniers mois) qui n’est plus épargnée par la poussée des défaillances. La région a su cependant le mieux contenir le nombre de défaillances depuis la crise (- 7,6 % depuis 2009) – même si elle concentre toujours près d’une faillite sur cinq.
La quasi-totalité des secteurs connaît une situation dégradée
Plusieurs secteurs affichent des défaillances en léger repli sur les douze derniers mois. Cependant, en dehors du commerce de gros qui enregistre une baisse tendancielle depuis dix ans, les autres secteurs connaissent en réalité une dégradation : les volumes de défaillances avoisinent les points hauts observés depuis 2000, notamment pour le commerce de détail. L’hébergement et restauration, ainsi que la construction connaissent même un rebond préoccupant des défaillances en 2014. « La construction est un secteur clé dans notre économie, pesant pour 5 % du PIB, 25 % de l’investissement et plus de 5 % de la population active en France, commente Nicolas Delzant. Or, elle représente également près d’un quart des faillites et sa situation semble se dégrader fortement depuis quelques mois. Sa sortie de crise est essentielle et requiert des mesures de soutien adaptées, pour à la fois relancer les grands travaux, les rénovations de logements et la construction de logements neufs. »
L’entrée d’une entreprise en procédure collective laisse peu d’issues favorables
Sur la période 2006-2011, plus de 70 % des entreprises entrées en redressement judiciaire suite à de premières difficultés ont finalement subi une liquidation judiciaire. De même, 40 % des procédures de sauvegarde ont fini en liquidation, avec ou sans passage par un redressement judiciaire.
Autrement dit, l’entrée en procédure collective d’une entreprise se solde en fin de parcours par une liquidation dans près de neuf cas sur dix, un ratio qui demeure aujourd’hui plus élevé qu’avant la crise. « Depuis sa mise en place en 2007, la sauvegarde est encore assez peu utilisée, signale Maxime Lemerle. Ce rempart qui devait donner du temps à l’entreprise pour trouver un nouveau souffle décolle difficilement : déjà fortement fragilisées, 90 % des entreprises qui entrent en procédure collective peinent à trouver une issue favorable et finissent en liquidation judiciaire. »
Vos réactions