Pourquoi la Blockchain va universaliser le Crowdlending
Par Alexandre Azoulay, président de SGH Capital et d’ORIGIN Investing
Encore jeune, le secteur du crowdlending ne représente pas encore un concurrent sérieux pour le monde bancaire. Même si, au troisième 2015, le cumul total des fonds levés atteignait 46 millions d’euros en France, le crowdlending ne pèse que 0,8 % sur le marché total des prêts bancaires aux entreprises. Reste qu’avec l’arrivée de technologies comme la Blockchain, les lignes devraient bouger dans les dix prochaines années.
« En 2025, la Blockchain fera l’objet d’une adoption massive », nous rapporte une étude menée par l’entreprise conseil Accenture. Et, à en juger par les multiples esquisses d’adoption entamées ces douze derniers mois dans le monde entier, la prédiction peut être prise au sérieux : Smart Contracts pour le droit, sanctuarisation des registres cadastraux pour l’immobilier, détection des contrefaçons pour l’e-Commerce, etc.
Pour le secteur du Crowdlending, il s’agit probablement là du « blockchaînon » manquant au bon développement de ces plates-formes au potentiel immense. La chaine de blocs leur permettrait de mettre en place une automatisation robuste et surtout intangible des processus et par extension de rendre leur offre plus « liquide ». Les entreprises clientes bénéficieraient ainsi d’un service simple et rapide intégrant doté d’une évaluation fiable du risque, le tout pour des coûts transactionnels quasi nuls.
Une chaîne de valeur automatisée de A à Z
Mais cette automatisation des prêts à l’économie ne servira pas les intérêts seuls des Crowdlenders. Cela va beaucoup plus loin.
Sachant que dans un futur proche les bilans des entreprises seront gérés par des ERP pourvus d’une intelligence artificielle à la fois micro et macro-économique, on sait d’ores et déjà que ces mêmes progiciels de gestion assureront automatiquement l’optimisation des charges financières et des coûts de livraison, le financement des factures selon les besoins de paiement, etc.
Concrètement, tous les paramètres qui influencent le compte de résultat seront interprétés et ajustés en temps réel, sur des informations internes/micro-économiques, mais aussi sur des paramètres exogènes/macro-économiques tels que l’inflation ou les indices de prix des matières premières.
Il faudra cependant attendre encore quelques années avant que l’ensemble des flux d’informations relatifs aux entreprises soit immédiatement indexé et disponible au sein d’une Blockchain. Qu’elle soit publique ou privée à l’image de celle développée par le consortium R3. Par extension, on imagine sans peine que, dans une PME, le directeur financier – ou le dirigeant lui-même – sera suboptimal en termes de gestion financière et opérationnelle face à cette chaîne de valeur digitale.
TPE : Pas de Blockchain ? Pas de Crowdlending !
Si le Crowdlending est assurément la passerelle vers un marché financier encore difficile d’accès pour les SAP, Sage et autres outils de pilotages budgétaires, les plates-formes de Crowdlending actuelles restent encore trop légères face aux risques intrinsèques à leur portefeuille. Pire, au-delà de cette impossibilité de vérifier les transactions d’une PME, les plates-formes actuelles font le pari du jeu statistique pour compenser une information imparfaite.
On retrouve ici le même schéma appliqué aux produits financiers synthétiques immobiliers entre 2003 et 2007 aux Etats-Unis. Avec le résultat que nous connaissons… Ne perdons pas de vue que le risque réel ne disparaît jamais s’il n’est pas identifié et compensé.
Bref, en attendant l’intégration de la Blockchain, les plates-formes de Crowdlending devront donc se limiter à des PME de tailles minimales, pour lesquelles l’évaluation du risque est possible et remettre à demain le traitement des TPE à des montants unitaires faibles.
L’humain comme simple déclencheur de décisions
En parallèle, une nouvelle génération de plate-forme est déjà en développement : des plates-formes hyper-décentralisées sur lesquelles le scoring holistique des emprunteurs sera nourri par plusieurs centaines de points de références. L’authentification progressive par des horodateurs virtuels (Ledgers) de l’ensemble des transactions et documents économiques élimine le doute et réduit le risque.
Il faut imaginer une chaîne logistique universelle dans laquelle l’humain ne fait que déclencher une décision, avant d’en être affranchi par l’intelligence artificielle. Les robots dans les usines, la logistique autonome (par drones routiers et aériens) et la virtualisation des opérations financières créent une Supply Chain constamment optimale. On se rapproche de la théorie libérale du marché pur et parfait, sans impact humain et également du coût marginal zéro avancé par Jérémy Rifkin.
Aujourd’hui il y a encore du pain sur la planche et, comme disait Saint-Exupéry, prévoir l’avenir est une chose, mais encore faut-il se donner les moyens de le rendre possible !
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