Loi Elan: la consécration du numérique au service de l’immobilier
Par Olivier Colcombet, directeur général de Digit RE Group (détenu par Artémis, 4 réseaux immobiliers, OptimHome, Capifrance, Immobilier Neuf et Réfleximmo, 130 M€ de chiffre d’affaires).
Le projet de loi Elan (pour l’Evolution du logement, de l’aménagement et du numérique) n’est pas encore une loi: une saisine du Conseil constitutionnel en diffère la promulgation et l’entrée en vigueur de quelques semaines. Ce texte considérable, de près de soixante-dix articles et d’une centaine de dispositions, a fait parler de lui pour deux grands sujets, la réforme du droit de l’urbanisme et de la construction, et la modernisation du mouvement HLM. Ces deux domaines, en effet, majeurs ont fini par faire oublier que la loi Elan avait pour ambition de mieux faire rimer immobilier et digital. Or, le moins qu’on puisse dire est qu’elle aura atteint ses résultats. La vie des ménages et les pratiques des professionnels vont s’en trouver changés.
Urbanisme
Sur le volet de l’urbanisme, c’est la possibilité pour les promoteurs de déposer une demande de permis de construire dématérialisée et pour les services municipaux la faculté d’en faire une instruction en utilisant les mêmes moyens. Il est clair que ce dispositif est adapté aux grandes villes plus qu’aux autres communes, et va concerner, notamment les projets urbains d’ampleur. Pour mémoire, ce sont aujourd’hui des mètres cubes de papier, entre 3 et 10, qui doivent être livrés en mairie pour obtenir l’autorisation de construire une tour. La seule vérification qu’aucune pièce ne fait défaut prend des semaines. Le moindre complément occasionne des échanges téléphoniques, des rencontres et retarde le processus, qui est à ce jour rarement inférieur à une année.
Additionné à la solution du BIM (carnet numérique de l’immeuble), ce processus de délivrance des autorisations de construire va considérablement faciliter et accélérer la conception et la production des logements.
Pour les services au logement, lʼElan va encore plus loin que les textes qui l’ont précédé, l’Alur en particulier. Désormais, les assemblées générales de copropriété pourront se tenir à distance, par la visioconférence mais aussi par l’envoi dématérialisé des documents nécessaires à sa tenue. Les convocations, les votes, les procès-verbaux, les lettres de relance, les convocations peuvent ou pourront bientôt être digitaux. Il faut se rappeler que la loi « Pour une République numérique » votée sous le quinquennat de François Hollande avait d’un paragraphe écrit le scénario: elle disposait que pour le logement tous les textes réglementaires qui exigeraient une modification pour permettre de numériser les pratiques seraient revus en conséquence.
Bail numérique
On assiste également à ce mouvement dans les relations locatives. La future loi Elan crée deux dispositifs qui vont permettre à la digitalisation des contrats de faire un bond: un agrément sera donné à l’avenir aux sociétés informatiques qui mettent à disposition des professionnels voire des particuliers des logiciels pour faciliter la conclusion des baux d’habitation. L’idée consiste à normaliser les contrats et d’ailleurs le projet de loi habilite le gouvernement à créer par ordonnance un bail numérique, qui pourra donner lieu à signature électronique. Le même texte de loi permet la transmission par voie numérique les diagnostics techniques obligatoirement associés à un contrat de location pour la bonne connaissance du bien. Il supprime aussi la longue mention manuscrite. Que signifient ces innovations? Que tous les freins sont levés les uns après les autres pour que le recours au digital en faveur des ménages et des professionnels se généralise dans l’immobilier. Certains le craignent encore et ils ont tort, pour trois grandes raisons.
D’abord, la plupart des dispositions légales concernées ne crée pas de contrainte, mais ouvre une faculté. Le degré d’utilisation dépendra toujours des promoteurs, des conseillers en immobilier, des administrateurs de biens...et de leurs clients. En somme, le numérique devient un élément de la stratégie de différenciation, ni plus ni moins.
Ensuite, le numérique facilite incontestablement la vie: qui nierait par exemple que signer un bail à distance, alors qu’on s’est déjà déplacé, souvent de loin, pour visiter un bien, constitue un progrès, ou que la possibilité de participer sans bouger à son assemblée générale ne remédie à l’absentéisme?
Qui ne se réjouirait non plus que les taches et les gestes répétitifs, de saisie, de reprographie, soient reléguées au rayon du passé, notamment pour les jeunes diplômés que cet aspect des services immobiliers rebutait ?
Transparence
Enfin, pour tous, le numérique est synonyme d’économie. Une illustration? L’envoi en recommandé physique avec accusé de réception d’un compte rendu d’assemblée générale coûte plus de trois fois plus cher que la même démarche digitale, de l’ordre de 7€ dans le premier cas en moyenne, contre 2€.
L’immobilier est structurellement complexe, onéreux aussi. Les ménages voient avec bonheur que l’immobilier est en train de gagner en agilité, en simplicité, en transparence, en rapidité, en accessibilité financière. Pour la transaction et la gestion, des acteurs ont montré la voie, les réseaux de conseillers indépendants, qui ont fait la part belle aux outils numérique pour rapprocher l’immobilier des ménages. Ils continueront à rester exemplaires en matière de confiance accordée au digital pour améliorer sans cesse les services au logement.
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