Le mirage de l’abattement renforcé de 85 %
Par Olivier Rozenfeld, président de Fidroit (achevé de rédiger le 30 mai)
Sur le papier, la mise en place du dispositif de l’abattement renforcé est une mesure favorable à la transmission des entreprises, et donc à leur survie. Mais dans les faits, il ne s’applique que dans une large minorité de cas.
Les plus-values mobilières, en particulier en cas de transmission d’entreprise, sont dorénavant taxées au barème progressif, mais profitent d’abattements pour durées de détention. L’abattement renforcé peut aller jusqu’à 85 %. Il faut s’en réjouir. En effet, au-delà de huit ans, on peut ainsi atteindre des taux effectifs d’imposition de 25 %, y compris lorsque le taux marginal d’imposition est de 45 %. Nous sommes alors dix points en dessous de la moyenne européenne.
Stop aux effets d’annonce !
En fait, la vraie question est de savoir qui va vraiment en profiter ? Autrement dit, au-delà de l’effet d’annonce, examinons la réalité.
Trois hypothèses sont prévues :
- les cessions intrafamiliales ;
- les cessions de titres de sociétés qui avaient moins de dix ans lors de leur acquisition ;
- et les chefs d’entreprise qui partent à la retraite.
C’est là que je m’interroge : quels sont les (peu de) chanceux qui en profiteront ?
Dans le premier cas, l’acquéreur doit être une personne physique, ce qui lui interdit de déduire les intérêts de l’emprunt qu’il va souscrire pour acquérir la société. C’est donc rédhibitoire !
Dans le second cas, la PME concernée ne doit pas résulter d’une restructuration, concentration, extension ou reprise d’activités préexistantes. Autrement dit, les opérations de croissance externe et de réorganisation sont proscrites. Autant dire à un chef d’entreprise que l’immobilisme est la seule réponse en matière fiscale ! Vous souhaitez vous développer, non Monsieur, c’est contraire à l’esprit de la loi !
Seul le dernier cas est relativement accessible, si tant est qu’on parte à la retraite ! Mais, là aussi, il faut respecter scrupuleusement les conditions prévues par le texte. L’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris de Paris du 18 mai dernier (cf. encadré) nous rappelle les conditions qu’il faut respecter. Attention, soyez rigoureux car elles sont multiples et cumulatives. Beaucoup d’erreurs d’application ont déjà été commises.
Assouplir les règles
Que les conditions attachées à un texte soient scrupuleusement respectées ? Oui ! Qu’on fasse une distinction entre un gérant de fait et un gérant de droit ? Ok, même si on pourrait faire remarquer à l’administration qu’elle cherche, parfois, à appliquer à une société de fait des règles d’une société immatriculée comme telle. Mais de manière générale, on voit bien que certaines conditions, comme celles des PME de moins de dix ans, sont antiéconomiques. On attend donc un assouplissement des textes pour donner son plein effet à un texte, par ailleurs, positif !
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