Loi de finances pour 2019 et loi Pacte : point d’étape des discussions
Par l’équipe d’ingénierie patrimoniale France d’Edmond de Rothschild
Voici un point d’étape sur l’avancement des discussions parlementaires en cours de vote devant le parlement. Ces mesures ne sont pas définitivement votées et pourront faire l’objet de nouveaux amendements d’ici la fin du parcours législatif. Les députés ont achevé l’examen en première lecture et adopté par un vote la première partie du projet de loi de finances pour 2019. L’étude de la seconde partie du projet a débuté le 30 octobre. A noter également l’adoption par les députés, en première lecture, des projets de loi Pacte, et de financement de la sécurité sociale (LFSS) 2019.
Apport à holding avant cession : 60 % à réinvestir au lieu de 20 % mais ouverture au capital-risque ?
Depuis le 14 novembre 2012, lorsqu’un contribuable apporte des titres à une société soumise à l’impôt sur les sociétés qu’il contrôle à l’issue de l’apport, un report d’imposition a vocation à s’appliquer sur la plus-value constatée au moment de l’apport. Lorsque les titres apportés sont cédés, rachetés, remboursés ou annulés dans un délai de 3 ans à compter de la date de l’apport, la plus-value en report n’est pas exigible immédiatement si la société holding réinvestit 50% du produit de cession dans une activité économique et dans les deux ans de la cession.
Un amendement au PLF 2019 vient d’être adopté et apporterait deux modifications majeures pour les opérations d’apport réalisées à compter du 1er janvier 2019 :
1. l’obligation de réinvestissement serait portée à 60% du produit de cession au lieu de 50% actuellement ;
2. deviendrait éligible la souscription de parts de certaines structures de capital investissement (FCPR, FPCI, SCR, SLP) ayant vocation à investir à hauteur d’au moins 75 % dans des titres de jeunes PME opérationnelles. S’agissant de la notion de « jeunes » PME, le texte reprendrait celle qui était applicable aux fonds éligibles à la réduction d’ISF PME.
IFI : du nouveau concernant l’évaluation des sociétés
Certaines précisions sont apportées afin d’assurer une application uniforme des règles de déductibilité des dettes au titre de l’IFI. Les prêts in fine contractés par les sociétés devraient également être amortis fiscalement. Jusqu’à présent, ce retraitement des prêts in fine n’était applicable qu’aux prêts contractés par des personnes physiques. Pour l’évaluation des parts ou actions de sociétés, certaines dettes ne sont pas prises en compte (par exemple certains comptes courants d’associés constitués après le 1er janvier 2018, ou certaines dettes souscrites par une société pour racheter un bien immobilier au contribuable). La rédaction actuelle du texte ne semble pas viser les dettes ayant servi à acquérir des parts sociétés immobilières (seuls les biens et droits immobiliers seraient visés).
Ces mesures anti-abus s’appliqueraient donc également aux acquisitions de parts de sociétés immobilières.
Assouplissement du régime Dutreil
Le dispositif Dutreil est profondément assoupli. On retiendra les réformes suivantes :
- Le régime de faveur ne serait plus remis en cause totalement en cas de cession ou de donation au profit d’un autre signataire de l’engagement collectif ;
- Les obligations déclaratives annuelles pesant sur la société et sur les bénéficiaires du dispositif seraient supprimées pendant la durée des engagements collectifs et individuels, sauf en fin d’engagement individuel ou sur demande expresse de l’administration. Cette simplification s’appliquerait aux pactes Dutreil en cours.
- Facilitation des LBO intra familiaux : Il serait permis d’apporter les titres donnés en Dutreil à un holding pendant la première phase d’engagement collectif de deux ans : il ne serait plus nécessaire d’attendre la fin de l’engagement collectif de deux ans pour constituer le holding de l’enfant repreneur ; Il serait possible d’apporter à un holding les titres d’une société interposée (holding passive) signataire d’un engagement collectif et ayant fait l’objet d’une transmission Dutreil ; La holding recevant les titres apportés n’aurait plus à être exclusivement détenue par les bénéficiaires de l’exonération et les donateurs (minoritairement) : les donateurs (signataires de l’engagement collectif) pourraient être majoritaires et des tiers (ex : fonds d’investissement) pourraient être associés jusqu’à 25% du capital ; L’actif du holding pourrait être composé d’autres actifs que les titres « Dutreillés », la valeur des titres apportés sur lesquels porte l’engagement devant représenter au minimum 50% de l’actif brut de la holding en valeur réelle. La holding pourra être une société animatrice de groupe.
- A compter du 1er janvier 2019, les seuils de détention seraient abaissés : pour les entreprisés cotées à 10% des droits financiers et 20% des droits de vote (au lieu de 20% des droits financiers et des droits de vote) et pour les entreprises non cotées, à 17% des droits financiers et 34% des droits de vote (au lieu de 34% des droits financiers et des droits de vote).
- Les titres de sociétés holding passives, dans la limite d’un seul niveau d’interposition, pourraient bénéficier de l’engagement réputé acquis.
- En parallèle de ces modifications législatives, on notera la suppression des commentaires administratifs relatifs à l’ISF qui permettaient de conclure à l’éligibilité de l’activité de location meublée au dispositif Dutreil transmission.
Imposition des non-résidents : un taux minimum d’imposition qui passe de 20 à 30 %
Le taux d’imposition minimum des revenus de source française par les contribuables non domiciliés en France calculé par application du barème progressif, ne pourrait être inférieur à 30% du revenu net imposable, au lieu de 20% actuellement.
Pour mémoire, ce taux minimum n’est pas applicable si le contribuable justifie que le taux moyen qui résulterait de l’imposition en France de l’ensemble de ses revenus mondiaux serait inférieur.
Exonération d’impôt sur la plus-value de cession de la résidence principale
Les contribuables nouvellement non-résidents pourraient bénéficier de l’exonération au titre de la cession de leur résidence principale, à condition qu’elle soit réalisée avant la fin de l’année suivant celle de ce départ et que le logement soit resté inoccupé pendant ce délai.
Revenus fonciers, plus-values immobilières : exonération des prélèvements sociaux pour les non-résidents (PLFSS)
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale prévoit une suppression pure et simple de l’assujettissement aux prélèvements sociaux des revenus du patrimoine immobilier (à compter du 1er janvier 2018 pour les revenus fonciers et du 1er janvier 2019 pour les plus-values immobilières) pour l’ensemble des résidents d’un Etat membre de l’EEE ou de Suisse affiliés à un régime de sécurité sociale à l’étranger.
Les personnes assujetties à un régime de sécurité sociale d’un Etat tiers resteraient quant à elles exclues de cette nouvelle mesure.
En matière d’impôt sur les sociétés
La réduction du taux de la quote-part de frais et charges de 12 à 5 % en cas de cession de titres de participation ne s’appliquerait qu’aux cessions de titres intragroupe (ou assimilés). Le taux de 5% (conduisant à une imposition au taux de 1,55% en 2019) serait donc réservé aux cessions de titres entre sociétés membres d’un groupe. En dehors de cette hypothèse, les plus-values à long terme sur titres de participation seraient taxées à l’IS au taux maximal de 3,72% (le taux de l’IS est fixé pour 2019 à 31%).
La limitation de la déductibilité des charges financières est modifiée. Le texte prévoit une règle plafonnant la déduction des charges financières nettes à 30% de l’EBITDA ou à 3 M€ si ce montant est supérieur. Il est proposé de créer une exception au principe d’irrévocabilité de l’option pour l’IS dans le cas où le dirigeant de l’entreprise estime avoir effectué un choix de régime fiscal qui s’avère pénalisant pour l’entreprise.
La renonciation à l’option serait possible jusqu’au 5e exercice suivant celui au cours duquel ladite option a été exercée. En l’absence de renonciation dans ce délai, l’option deviendrait irrévocable.
On notera que le projet de loi Pacte, qui sera discuté au Sénat au premier trimestre 2019, prévoit la suppression de l’obligation de détention de 5% du capital en cas d’apport en compte courant à une société commerciale.
Protection universelle maladie (PUMA) – PLFSS 2019
Pour mémoire, depuis 2016, la protection universelle maladie (Puma) permet une prise en charge des frais de santé sans rupture de droits en cas de changement de situation professionnelle (perte d’emploi…), familiale (séparation…) ou de résidence.
La PUMA est financée par une « cotisation subsidiaire maladie » due par les assurés résidant en France de manière stable et régulière, qui remplissent les critères suivants :
- Les revenus de l’activité de l’assuré et de son conjoint ou partenaire pacsés sont inférieurs à 10% du PASS (Plafond Annuel de Sécurité Sociale) soit 3 973,2 € au titre de 2018 ;
- L’assuré et son conjoint ou partenaire pacsé ne disposent d’aucun revenu de remplacement (pension de retraite, rente, allocation chômage).
Le projet LFSS envisagerait de réduire le taux de la cotisation à 6,5% au lieu de 8%. Par ailleurs, le seuil de revenus d’activité à atteindre pour être dispensé de la CSM serait porté de 10% à 20% du PASS (soit 8 104 € par an).
Enfin, l’abattement applicable sur l’assiette de la cotisation serait augmenté de 25 à 50% du PASS et l’assiette de cotisation serait plafonnée à 8 PASS, soit une cotisation CSM maximale de 19 755 € pour 2019.
Le dispositif d’Exit Tax serait assoupli
L’impôt établi à l’occasion du transfert de domicile peut faire l’objet d’un dégrèvement d’office (prélèvements sociaux inclus) ou d’une restitution à l’expiration d’un délai de 15 ans. Ce délai serait porté :
- à 2 ans lorsque la valeur totale des titres est inférieure à 2,57 millions d’euros à la date du transfert du domicile fiscal du contribuable hors de France.
- ou à 5 ans lorsque la valeur desdits titres est supérieure à 2,57 millions d’euros.
Ce nouveau dispositif serait applicable aux transferts de domicile fiscal hors de France intervenus à compter du 1er janvier 2019. Les personnes ayant transféré leur domicile fiscal hors de France avant cette date resteraient soumises aux règles antérieures (règle des 15 ans).
Projet de loi Pacte : les principales nouveautés
Un PEA ouvert aux mineurs
Le texte adopté par l’Assemblée nationale prévoit la mise en place d’un PEA jeune pour les enfants rattachés au foyer fiscal de leurs parents. Jusqu’à présent l’ouverture d’un PEA était exclusivement réservée aux personnes majeures. Les conditions de clôture du PEA seraient modifiées en cas de retrait entre 5 et 8 ans. Dans ce cas précis, le retrait n’entrainerait pas la clôture du plan. Par contre, les versements supplémentaires ne seraient plus possibles.
Les contrats de capitalisation et d’assurance-vie devront répondre à des exigences en matière d’investissement
Les contrats souscrits à partir du 1er janvier 2020 devraient être investis, pour une part minimale comprise entre 5 et 10 %, en titres émis par des entreprises solidaires d’utilité sociale agréées ou par des fonds communs de placements à risque composés d’au moins 40 % de titres émis par des entreprises solidaires.
Et à partir de 2022, les contrats devront proposer au moins deux unités de compte, dont une relevant de l’investissement social ou par des fonds communs de placements à risque responsables et une relevant de la finance verte ou solidaire.
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