Transmission des PME : maîtriser et sécuriser les déclarations de plus-values en cas de départ à la retraite
Par Jacques Duhem de FAC Jacques Duhem
Depuis plus de dix années, le législateur a mis en place un régime de faveur applicable en cas de cessions à titre onéreux de titres motivées par un départ à la retraite. Ce régime arrive à expiration le 31 décembre 2017. Une analyse de FAC Jacques Duhem
Conséquence de la configuration de la pyramide des âges, nombre de PME sont en cours de cession, ou seront cédées prochainement à l’occasion du départ à la retraite du ou des dirigeants.
La transmission à titre onéreux des titres est l’opération la plus souvent rencontrée en pratique. Les impacts fiscaux sont nombreux et complexes en cas de cession de titres de sociétés opérationnelles.
Les textes et la doctrine administrative traitant du sujet sont particulièrement complexes. Régulièrement, des réponses à des questions posées par des parlementaires et des décisions rendues par des juridictions viennent préciser les contours de ce régime.
Depuis plus de dix années, le législateur a mis en place un régime de faveur applicable en cas de cessions à titre onéreux de titres motivées par un départ à la retraite. Ce régime arrive à expiration le 31 décembre 2017. On attendra donc avec intérêt les prochaines évolutions législatives à venir dans les prochains mois.
Le champ d’application de la mesure est restrictif
Des conditions doivent être respectées par la société dont les titres sont cédés.
Conditions relatives à la société
La société cédée doit être une PME remplissant de manière cumulative les conditions suivantes :
- elle emploie moins de 250 salariés au 31 décembre de l’une ou l’autre des trois années précédant celle de la cession ;
- son chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou le total de son bilan n’excède pas 43 millions d’euros au titre du dernier exercice clos ou, comme admis par l’administration, à la clôture de l’un ou l’autre des trois derniers exercices précédant celui de la cession (BOI-RPPM-PVBMI-20-30-30-20 n° 240) ;
- son capital est détenu à hauteur de 75 % au moins, de manière continue au cours du dernier exercice clos, par des personnes physiques ou d’autres sociétés répondant elles-mêmes aux deux conditions ci-dessus ;
- elle doit avoir exercé, de manière continue au cours des cinq années précédant la cession, une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière;
- elle a son siège social dans un Etat de l’Espace économique européen ;
- elle est soumise à l’impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun ou y serait soumise dans les mêmes conditions si l’activité était exercée en France.
Des conditions doivent être respectées par le cédant
Pendant les cinq années précédant la cession, le cédant doit, sans interruption :
- avoir été dirigeant de la société dont les titres sont cédés, dans les conditions requises pour bénéficier de l’exonération d’ISF ;
- avoir détenu au moins 25 % des droits de vote ou des droits financiers de la société cédée soit directement, soit par personne interposée, soit par l’intermédiaire de son groupe familial (conjoint ou partenaire de Pacs, leurs ascendants, descendants ou frères et sœurs).
Le cédant doit en principe cesser toute fonction, de direction ou salariée, dans la société et faire valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession.
En cas de cession des titres à une société, le cédant ne doit pas, à la date de la cession et pendant les trois années suivantes, détenir directement ou indirectement de droits de vote ou de droits dans les bénéfices sociaux de cette société.
Des conditions concernent les titres cédés
La cession doit porter sur l’intégralité des titres ou droits détenus par le cédant dans la société ou, lorsque le cédant détient plus de 50 % des droits de vote, sur plus de 50 % de ces droits ou, en cas de la seule détention de l’usufruit, sur plus de 50 % des droits dans les bénéfices sociaux.
La portée économique de la mesure est limitée
L’exonération des plus-values ne concerne que l’impôt sur le revenu stricto sensu. Dans toutes les situations, celui qui réalise la plus-value aura à s’acquitter des prélèvements sociaux (actuellement au taux de 15,50 %) et, le cas échéant, de la CEHR (contribution exceptionnelle sur les hauts revenus) au taux de 3 ou 4%.
L’assiette permettant de calculer les prélèvements sociaux et la CEHR ne bénéficie d’aucun abattement.
Au regard de l’impôt sur le revenu, les plus-values réalisées suite à un départ à la retraite bénéficient d’abattements en base. Un abattement fixe de 500 000 € est d’abord pratiqué.
Sur l’éventuel reliquat de plus-value, le cédant applique un abattement renforcé pour durée de détention :
- 50 % lorsque les titres ou droits sont détenus depuis au moins un an et moins de quatre ans à la date de la cession ;
- 65 % lorsque les titres ou droits sont détenus depuis au moins quatre ans et moins de huit ans ;
- 85 % lorsque les titres ou droits sont détenus depuis au moins huit ans.
Bon à savoir
Comment s’applique l’abattement de 500 000 € ?
La solution a évolué depuis la publication de la réponse à la question du sénateur Cadic (RM Cadic n° 14869 JO Sénat 01/09/2016)
Conformément aux dispositions de l’article 150-0 D ter du code général des impôts (CGI), tel que modifié par l’article 17 de la loi de finances pour 2014 (loi n°2013-1278 du 29 décembre 2013), les plus-values de cessions de parts ou d’actions (ou de droits démembrés portant sur ces parts ou actions) de petites et moyennes entreprises (PME) réalisées par les dirigeants lors de leur départ à la retraite sont réduites, sous certaines conditions, d’un abattement fixe de 500 000 € et, pour le surplus éventuel, d’un abattement proportionnel pour durée de détention renforcé mentionné au 1 quater de l’article 150-0 D du même code pouvant atteindre 85 % au bout de huit ans de détention des titres cédés. Ces abattements sont personnels et bénéficient à chaque cédant, qu’il soit gérant unique ou cogérant, remplissant l’ensemble des conditions prévues par la loi. S’agissant plus particulièrement des modalités d’application de l’abattement fixe, celui-ci est pratiqué une seule fois sur l’ensemble des plus-values réalisées par le dirigeant lors des cessions de titres et droits d’une même société, que ces plus-values soient réalisées la même année ou, dans le cadre de cessions échelonnées, dans la limite du délai de 24 mois commenté au I du BOI-RPPM-PVBMI-20-30-30-30, publié au Bulletin officiel des finances publiques - BOFIP. Ainsi, en cas de cessions échelonnées répondant aux conditions requises, le reliquat d’abattement non utilisé au titre de la première cession est imputable sur les plus-values retirées des autres cessions. Par ailleurs, dans l’hypothèse où le dirigeant céderait des titres ou droits de plusieurs sociétés, l’abattement fixe s’applique par société cible, toutes conditions remplies. Néanmoins, en cas de cession de titres ou droits émis par une société issue d’une scission intervenue au cours des deux années précédant la cession, l’abattement fixe de 500 000 € s’applique globalement à l’ensemble des plus-values de cessions des titres ou droits émis par cette société et la ou les autres sociétés issues de cette scission. Ces précisions figurent au BOFIP, aux BOI-RPPM-PVBMI-20-30 et suivants.
Un gérant de fait ne peut bénéficier des abattements
CAA Paris n°15PA02090 18/05/2016
Le bénéfice de l’abattement s’applique aux seuls cédants qui exercent l’une des fonctions limitativement énumérées au 1° de l’article 885 O bis du CGI. La fonction de gérant de fait ne figure pas dans cette liste.
Pas d’abattement en cas de cession de titres par le conjoint du dirigeant
CE 8 février 2017, n° 396580
La condition relative à l’exercice d’une fonction de direction doit s’apprécier, dans le cas d’un couple au niveau de chaque conjoint considéré isolément.
Cette solution a été confirmée par le Conseil d’Etat. En l’espèce, l’épouse détenait 50% du capital d’une société cédée. Il n’exerçait aucune fonction de direction dans cette société. Son époux était dirigeant de cette structure mais ne détenait aucun titre dans celle-ci.
Les juges ont dans ce cas écarté le fait qu’en vertu de leur régime matrimonial (Régime légal de la communauté réduite aux acquêts), les titres souscrits par l’épouse pendant le mariage devaient entrer dans la communauté.
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