Projet de loi de finances pour 2019, les principales réformes annoncées

Par : edicom

Par l’équipe d’ingénierie patrimoniale France d’Edmond de Rothschild

Le projet de loi de finances pour 2019 a été présenté en Conseil des ministres et déposé à l’Assemblée nationale. Ce texte prévoit diverses mesures pouvant avoir un impact important sur la transmission et la cession d’entreprise. Nous retiendrons une évolution favorable de la taxation des cessions de participations par des holdings, un remaniement de l’Exit tax, ainsi qu’un assouplissement du régime d’exonération partielle des droits de succession/donation dans le cadre du dispositif Dutreil.

Aménagement du prélèvement à la source

Le prélèvement à la source entrera en vigueur le 1er janvier 2019. Certains aménagements sont prévus dans ce cadre :

- L’avance destinée à anticiper des crédits liés à l’emploi d’un salarié à domicile et frais de gardes des jeunes enfants est étendu à d’autres crédits ou réductions d’impôts (Pinel, Duflot, Censi Bouvard…) ;

- Le taux de l’avance serait porté de 30 à 60% ;

- Les particuliers employeurs seraient dispensés de prélever la retenue à la source sur les revenus de leurs salariés versés en 2019.

 

Le dispositif d’Exit Tax serait considérablement assoupli

Pour rappel, l’Exit Tax est un mécanisme d’imposition des personnes physiques qui transfèrent depuis le 3 mars 2011 leur domicile fiscal hors de France (CGI. Art. 167 bis). Ce transfert entraîne la taxation à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux des plus-values latentes sur titres, des créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix, et des plus-values en report d’imposition. Ce texte offre, toutefois, la possibilité de bénéficier d’un sursis de paiement et d’un dégrèvement d’impôt sous conditions. Le gouvernement cherche à modifier en profondeur ce texte en le limitant à un simple dispositif de lutte contre les transferts abusifs de domicile fiscal hors de France.

 

Une réduction du délai de dégrèvement de l’imposition des plus-values latentes

L’impôt établi à l’occasion du transfert de domicile peut faire l’objet d’un dégrèvement d’office (prélèvements sociaux inclus) ou d’une restitution à l’expiration d’un délai de quinze ans. Ce délai serait porté à deux ans. Cependant, le texte n’a pas encore été discuté devant le parlement. Le rapporteur général du Budget à l’Assemblée (député LaRem) souhaite que les plus-values de cession soient soumises à une imposition en France jusqu'à cinq ans après l'expatriation du contribuable. Le délai peut donc évoluer d’ici le vote définitif .

 

Un assouplissement des conditions de sursis de paiement

Aujourd’hui le sursis de paiement est automatique (et sans constitution de garantie) lorsque le contribuable s’installe dans un état membre de l’Espace économique européen (EEE) ainsi qu’en Norvège, en Islande et au Liechtenstein. En dehors de ces pays, le sursis est accordé sur demande expresse.

- Le sursis de paiement de l’impôt serait désormais accordé de plein droit, sans constitution de garanties, non plus seulement en cas de départ vers un Etat membre de l’Union européenne ou certains Etats parties à l’accord sur l’EEE, mais aussi vers tout autre Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement.

- Une simplification des obligations déclaratives est également prévue.

- Ce nouveau dispositif serait applicable aux transferts de domicile fiscal hors de France intervenus à compter du 1er janvier 2019.

Concernant les personnes ayant déjà transféré leur domicile hors de France avant le 01/01/2019, ces dernières resteraient soumises aux règles antérieures de sursis de taxation et de conditions de dégrêvement (i.e règle des 15 ans).

Pour aller plus loin

Les transferts successifs : actuellement lors d’un deuxième transfert du domicile fiscal : transfert d’un Etat membre de l’EEE vers un Etat tiers à l’EEE, le bénéfice du sursis de paiement automatique est perdu sauf demande expresse. A compter du 1er janvier 2019, le sursis de paiement automatique serait maintenu en cas d’un transfert successif sauf si celui-ci a lieu vers un ETNC, ou un territoire tiers à l’Union européenne n’ayant pas conclu les conventions sus-visées.

Les opérations d’apport de titres : ce texte ne modifie pas l’imposition des plus-values mises en report, dans le cadre de l’article 150-0 B ter, préalablement au départ de France. Ces plus-values restent imposables en France quel que soit le délai dans lequel intervient la cession post départ de France. A compter du 1er janvier 2019, si une opération d’apport de titres intervient postérieurement au départ dans le délai de « dégrèvement de 2 ans », l’obligation de réinvestissement de 50% est maintenue en cas de cession des titres apportés dans un délai de 3 ans à compter de l’apport.

 

Des aménagements attendus pour les pactes Dutreil

La transmission à titre gratuit de parts ou actions de sociétés exerçant une activité commerciale, industrielle, libérale, agricole ou artisanale, de holdings animatrices et ayant fait l’objet d’un engagement collectif de conservation sont exonérées de droits de donation ou de succession à hauteur de 75%. Cette exonération s’applique également aux sociétés interposées (ou holding passive) qui détiennent une participation dans une société opérationnelle. Deux engagements de conservation des titres doivent se succéder, un engagement collectif de deux ans minimum suivi d’un engagement individuel de quatre ans pris par les donataires / héritiers à compter de la fin du premier engagement.

Ce dispositif souffrait, notamment pendant la période d’engagement collectif, de contraintes limitant les opérations sur les titres pactés, telles que par exemple la cession entre les signataires du pacte ou l’apport des titres pactés à une société holding.

 

Faciliter les cessions et donations entre signataires

Lorsqu’une cession/donation intervient durant l’engagement collectif sur des titres transmis en régime Dutreil, il n’y aurait plus de remise en cause totale de l’exonération lorsque la cession ou donation est opérée au profit d’un autre signataire de l’engagement collectif. La remise en cause de l’exonération ne concernerait que le cédant / donateur et ne porterait que sur les titres effectivement cédés ou donnés et non plus sur les autres titres conservés par le cédant / donateur.

Faciliter les LBO intra-familiaux

Dans le dispositif actuel, les opérations d’apports de titres à une société holding pendant la période d’engagement collectif de conservation sont prohibées. Seuls les apports réalisés pendant l’engagement individuel sont autorisés sous réserve que la société holding bénéficiaire de l’apport ait pour objet exclusif de détenir des titres dans la société soumise à l’engagement, impliquant nécessairement que la holding soit passive. Par ailleurs, cette société holding doit être détenue en totalité par les personnes physiques bénéficiaires de l’exonération, le donateur pouvant également y être associé sans pouvoir être majoritaire.

Afin d’adapter le dispositif Dutreil aux réalités économiques :

- il est proposé de permettre l’apport de titres pendant la phase d’engagement collectif ;

- cette faculté est étendue aux apports de titres de sociétés interposées (holding passive) signataires d’un engagement collectif ;

- il ne serait plus exigé que la holding recevant les titres apportés, soit exclusivement détenue par les bénéficiaires de l’exonération et que son actif soit uniquement composé des titres apportés. La valeur des titres apportés sur lesquels porte l’engagement devra représenter au minimum 50% de l’actif brut de la holding en valeur réelle.

- l’apport à une société holding animatrice serait désormais autorisé.

- Le capital de la holding bénéficiaire de l’apport pourrait être détenu jusqu’à 25% par un actionnaire extérieur. Ces évolutions permettent aujourd’hui d’envisager de faire participer un industriel ou un fonds à une opération de transmission familiale et de faciliter le financement de ces opérations de restructuration.

Autres mesures

Une clarification est apportée dans le cas d’une transmission d’une société holding passive : le principe du caractère figé des participations à chaque niveau d’interposition s’appliquerait également pendant la phase d’engagement individuel de conservation.

Enfin les obligations déclaratives annuelles pesant sur la société et sur les bénéficiaires du dispositif seraient supprimées pendant la durée des engagements collectifs et individuels, sauf en fin de période de l’engagement individuel et également sur demande expresse de l’administration. Cette simplification s’appliquerait aux pactes Dutreil en cours.

L’obligation de mettre fin à l’engagement collectif pour permettre aux engagements individuels de débuter est en revanche maintenue et devra toujours faire l’objet de la même vigilance.

 

Imposition de la plus-value en cas de crédit-vendeur

Lorsque le dirigeant de certaines PME cède la majorité de son capital social, le paiement du produit de cession pourrait être échelonné sous forme d’un crédit vendeur. Sont concernées les cessions de titres de PME de moins de 50 salariés et réalisant un chiffre ou ayant un total de bilan inférieur à 10 M€. Ce nouveau dispositif prévoit un étalement de l’imposition des plus-values (impôt et prélèvements sociaux) au fur et à mesure des remboursements effectifs et non plus une imposition immédiate de l’intégralité de la plus-value, sous réserve que le cédant ne conserve pas le contrôle de l’entreprise à l’issue de l’opération.

 

Des aménagements sur la fiscalité en matière d’IS, diminution de la quote-part de frais et charges

Les plus-values à long terme sur titres de participation (détention supérieure à 2 ans et minimum de 5% du capital de la filiale) sont exonérées d’IS à l’exception d’une quote-part de frais et charges dont le taux est actuellement fixé à 12%, ce qui conduit à une imposition à l’IS au taux de 3.72% (le taux de l’IS est fixé pour 2019 à 31%). Cette quote-part de frais et charges serait portée à 5% pour les cessions intervenant à compter du 1er janvier 2019, conduisant à u e imposition de 1.55% en 2019. Articulé avec la baisse programmée du taux de l’IS, l’imposition de cette quote-part aboutirait à l’imposition définitive suivante :

La taxation des cessions de filiales de holdings serait donc fortement diminuée, accentuant probablement les opérations de « cessions par le bas » au détriment des cessions dites « par le haut » (i.e des cessions de titres de holding par les personnes physiques).

 

Limitation de la déductibilité des charges financières

Actuellement, les charges financières qui atteignent un montant au moins égal à 3 millions d'euros doivent être réintégrées au résultat imposable pour une fraction forfaitaire égale à 25 % de leur montant. Le projet prévoit une règle plafonnant la déduction des charges financières nettes à 30% de l’EBITDA ou à 3 M€ si ce montant est supérieur.

 

Mise en place d’une révocabilité possible en cas de passage à l’IS

Afin d’encourager la croissance des entreprises, il est proposé de créer une exception au principe d’irrévocabilité de l’option pour l’IS dans le cas où le dirigeant de l’entreprise estime avoir effectué un choix de régime fiscal qui s’avère pénalisant pour l’entreprise.

Il est proposé, dans l’hypothèse d’une option à l’IS de renoncer à celle-ci jusqu’au 5e exercice suivant celui au cours duquel ladite option a été exercée. En l’absence de renonciation dans ce délai, l’option deviendrait irrévocable.

 

Pour aller plus loin

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  • Mise à jour le : 11/10/2018

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