Cryptomonnaie : attention aux arnaques !

Par : edicom

Par Hélène Feron-Poloni, avocate au Barreau de Paris

Internet est le haut lieu du commerce, mais également le creuset des arnaques en tout genre. La finance n’y échappe pas.

Tous les arguments sont bons pour convaincre les épargnants internautes d’investir dans tel ou tel produit, les escrocs ayant, semble-t-il, trouvé le chiffre magique : 7 % de rentabilité annoncée la plupart du temps, 8 % pour les plus audacieux. Mais le record de baragouinage financier est atteint par les escrocs spécialisés dans l’investissement dans le bitcoin ou autre cryptomonnaie : la rentabilité est annoncée sans plafond, et il faut reconnaître que les performances délirantes du bitcoin – quand il est réel – facilitent grandement la tâche des experts arnaqueurs. L’arnaque au bitcoin succède ainsi sans aucune difficulté au faux trading de devises (Forex) et au faux placement dans le diamant d’investissement ou autres pierres précieuses.

La fraude est d’autant plus aisée que la cryptomonnaie étant virtuelle, la victime ne s’attend à rien recevoir dans un premier temps en contrepartie de son règlement d’un montant souvent élevé.

L’« investissement » aura été réalisé après que la victime aura été mise en confiance par un entretien téléphonique avec un aimable conseiller qui lui aura tenu un discours aussi technique que séduisant, mais toujours rassurant.

Ce n’est que lorsque l’investisseur voudra toucher son capital investi augmenté du rendement espéré que la fraude sera découverte par la victime, la plupart du temps parce qu’il lui devient totalement impossible d’entrer en contact avec le site « vendeur » de cryptomonnaie : absence momentanée du conseiller habituel pour congé, pour accident de la route, pour décès de sa mère… Impossibilité de débloquer le dossier sans procéder au paiement d’une TVA (imaginaire bien sûr, mais qui donne l’occasion de solliciter de la part de la victime le virement d’un reliquat supplémentaire, qu’elle ne reverra jamais évidemment).

Les banques françaises en première ligne

Les victimes ne sont pas des personnes naïves : ce sont les escrocs qui sont d’excellents professionnels de la délinquance financière et il s’avère qu’ils sont considérablement aidés dans leur activité illégale par le défaut de vigilance des établissements bancaires.

En effet, les banques sont soumises à une obligation stricte de vigilance quant au fonctionnement des comptes qu’elles détiennent dans leurs livres, qu’elles soient teneurs de comptes ouverts par des escrocs ou qu’elles soient teneurs de comptes de victimes de cette escroquerie.

Les banques françaises sont en première ligne dans ce contentieux de l’escroquerie au bitcoin : la plupart du temps elles auront laissé passer des ordres de virement faits par leurs clients, alors que ceux-ci présentent tous les caractères d’une opération frauduleuse : le virement est fait au profit d’une banque située à l’étranger alors que la victime n’a aucune activité en dehors de la France, le virement est d’un montant bien plus élevé que les dépenses habituellement réalisées depuis le compte bancaire concerné, il contient un motif soit parfaitement clairement associable à la sphère « crypto » ou « bitcoin », soit au contraire complètement opaque, le bénéficiaire du virement est totalement méconnu de la banque et difficilement identifiable.

Tous ces éléments doivent amener la banque de la victime à bloquer le virement (ce qu’elle a légalement le droit et même l’obligation de faire) car l’opération est totalement anormale au regard de la connaissance qu’elle a de son client et de l’activité habituelle de son compte bancaire.

C’est pourquoi un comportement inerte de la banque entraînant pour son client la perte de sommes importantes dans cette escroquerie au bitcoin engage sa responsabilité et justifie qu’il lui soit demandé par la voie amiable, et à défaut d’accord, en justice, de procéder au remboursement des sommes perdues.

 

Dans le même dossier

Bitcoin et autres cryptomonnaies, la gestion de patrimoine à l’heure de la Blockchain

Par Guillaume Lucchini, dirigeant et fondateur de Scala Patrimoine

Quel avenir pour les cryptomonnaies ?

Par Fabrice Heuvrard, expert-comptable et commissaire aux comptes, cabinet Fabrice Heuvrard

Enjeux et difficultés comptables

Par Jeremy Lellouche, expert-comptable, commissaire aux comptes et associé-fondateur du cabinet Fox Audit

« Nos clients risquaient d’être soumis à un taux d’imposition d’environ 65 % dans le meilleur des cas »

Interview de Maître Nicolas Canetti, avocat associé au sein du cabinet Bornhauser

 

 

 

 

 

  • Mise à jour le : 26/10/2018

Vos réactions