Eric Cosserat : créateur de performance durable
De gauche à droite : Yann Guivarc’h, directeur général de Perial AM, Philippe Ifergane, directeur financier, Chris Hutin, secrétaire général, Eric Cosserat, président, Jean Pitois, directeur du développement.
Eric Cosserat dirige depuis près de vingt ans l’une des rares sociétés indépendantes de gestion de SCPI. Cette aventure commencée en pleine crise immobilière est ponctuée de choix stratégiques forts.
Historiquement entrepreneurs picards dans le velours depuis la fin du XVIIIe siècle (les Velours Cosserat), la famille Cosserat est à l’origine d’une des premières SCPI sous l’impulsion de Guy Cosserat, le père d’Eric Cosserat. En effet, l’activité dans le velours vendue dans les années soixante en raison de la crise sur le textile, la famille s’oriente vers l’immobilier de bureaux. En 1966 est alors créée la SCPI à capital fixe, PF1. Une SCPI qui existe encore et qui, depuis le 2 octobre dernier, a même été rouverte aux nouvelles souscriptions alors qu’elle était fermée depuis 1993 (cf. encadré). « Il s’agissait déjà, à l’époque, d’un produit d’épargne moderne dédié à la distribution d’immobilier de rendement. La vente de parts s’effectuait en marketing direct, via le couponing et la remise de certificats au porteur », se souvient Eric Cosserat.
La société s’est ensuite développée au gré du cycle économique. « Les années quatre-vingt ont été celles de l’euphorie pour le marché de bureaux, se souvient Eric Cosserat, qui n’opère pas encore dans la société à cette époque. Notre société a accompagné la tertiarisation de l’économie française, avec la création d’espaces de travail plus fonctionnels souvent construits sur des friches industrielles. Il ne s’agissait donc pas seulement d’immeubles haussmanniens, mais également de bureaux neufs ou récents basés à la Défense et en proche banlieue, à Vélizy par exemple. »
Gestion de crise
Puis arrive la crise violente des années quatre-vingt-dix, La société doit alors gérer les problèmes de marché secondaire sur ses SCPI. Peu de temps avant, Eric Cosserat avait rejoint son père. Après son école de commerce, il était d’abord parti travailler aux Etats-Unis durant deux ans. « Dans la famille, les entreprises se transmettent de père en fils, mais je ne souhaitais pas forcément travailler avec mon père… », s’amuse-t-il. Son père le convainc tout de même en 1990, mais les deux hommes s’allouent des fonctions bien distinctes. Eric Cosserat sera finalement chargé de la diversification de l’activité, à savoir la distribution de produits d’assurance, avec comme support d’investissement l’immobilier, ainsi que des solutions de prévoyance. L’activité se développe grâce au réseau de distribution constitué autour des SCPI.
La crise immobilière a donc fait évoluer les responsabilités d’Eric Cosserat. En pleine tempête, il prend en charge le service clients. Le groupe connaît des difficultés avec des opérations de promotions de logements en défiscalisation qui s’enlisent, alors que les demandes de rachat de parts sur les SCPI se multiplient.
Rapidement, en 1995, il assure ponctuellement la direction du groupe, son père étant victime d’un accident de santé. Puis, les deux hommes codirigent l’entreprise sur la base d’une gouvernance nouvelle, un directoire et un conseil de surveillance ; Eric Cosserat en assure la direction opérationnelle. « Cette organisation a permis à l’entreprise de mieux digérer le passage de relais », observe-t-il. Celui-ci surviendra suite à la disparition de son père en 1999. « 1995 et 1999 ont été des années charnières dans mon parcours. Je n’avais que 30 ans en 1995. Débuter durant des années difficiles a été très formateur », affirme-t-il.
Durant la crise, il fait le choix d’interrompre la distribution de produits d’assurance et la production de logements. « Il nous fallait d’abord rationaliser notre activité et nous concentrer sur notre cœur de business, puis, dans un second temps, nous adresser aux institutionnels ».
Cap sur les régions
Dès 1999, Eric Cosserat entrevoit la sortie de crise et donne une nouvelle impulsion au groupe. Perial lance la première SCPI d’après-crise, PFO axée sur l’immobilier en région, notamment Toulouse, Lyon et Lille. « L’immobilier à Paris était toujours en plein marasme. Il a été sauvé par les Américains qui, certainement plus habitués à la financiarisation de l’immobilier que les Français, avaient bien compris que l’immobilier est un actif cyclique. Toujours est-il que nous avons lancé PFO en région pour profiter du dynamisme de ces métropoles qui allaient se développer grâce à la création des infrastructures de transport : TGV, aéroports et autoroutes. L’offre de bureaux y était plus faible, avec moins de spéculation. Cela a constitué une formidable opportunité de sortie de crise ! »
Rapidement, PFO connaît un succès de collecte, notamment via des souscriptions en démembrement de propriété conseillées par les CGPI. La société est pionnière des partenariats avec les conseillers indépendants du patrimoine. « Je mets un point d’honneur à me rendre chaque année à Patrimonia, précise Eric Cosserat. Notre indépendance nous rapproche des CGPI : nous avons une culture entrepreneuriale et nous parlons le même langage. La pédagogie a été importante vis-à-vis de nos partenaires. Les SCPI sont plus que jamais un produit de long terme pour le financement de la retraite, une source de revenus complémentaires et qui peut être financé à crédit. »
En 2006, alors que plusieurs sociétés coexistent dans le groupe, Eric Cosserat décide de ne créer qu’une marque : Perial. Aujourd’hui, le groupe a choisi une stratégie d’intégration des différents métiers pour couvrir toute la chaîne de valeur de l’immobilier avec trois activités :
- la gestion des SCPI, OPCI et mandats via Perial Asset Management ;
- la gestion immobilière à Paris et en régions pour le compte de ses SCPI, mais également d’autres clients, avec Perial Property Management ;
- et la promotion d’immobilier de bureaux essentiellement, avec Perial Développement.
« Au final, le groupe Perial est un groupe intégré avec un fort ADN immobilier ; davantage que notre concurrence, se félicite Eric Cosserat. Nous avons fait le choix de nous orienter vers le nouvel immobilier, tout en accompagnant sa financiarisation. »
Développement durable
Trois ans plus tard, en 2009, une troisième SCPI est créée : PFO2, toujours investie sur de l’immobilier tertiaire. « Les questions relatives à l’énergie et au réchauffement climatique sont au cœur de nos réflexions, annonce Eric Cosserat. Nous sommes à l’époque du Grenelle de l’environnement, et nous constatons une forte obsolescence de l’immobilier de bureau avec un risque de dépréciation des actifs qui ne sont plus aux normes. Parallèlement, les entreprises deviennent plus vigilantes sur ces questions et sur leurs charges. Nous avons alors fait le pari de mettre la performance environnementale au service de la performance financière des portefeuilles. »
Il s’agit d’une stratégie d’investissement consistant à investir, d’une part, dans des immeubles faiblement énergivores pour une moindre dépréciation des biens dans le temps pour attirer et fidéliser les locataires et, d’autre part, d’acquérir des biens « à verdir » progressivement pour ainsi réer de la valeur. Parallèlement, la société met en place des reportings environnementaux sur sa gestion. Le succès est au rendez-vous, puisque la SCPI atteint aujourd’hui une capitalisation de plus de 1,8 milliard d’euros et devient ainsi un produit phare sur le marché de l’épargne immobilière.
Ouverture des frontières
Aujourd’hui, la société compte 160 collaborateurs, contre 55 à la fin des années quatre-vingt-dix. Elle gère 3 milliards d’euros d’encours, à 90 % dans les SCPI pour 37 000 associés ; le solde étant constitué d’OPCI professionnels et de mandats gérés pour le compte d’investisseurs institutionnels. La collecte a atteint 400 millions d’euros l’an passé et devrait être équivalente cette année. « Notre cœur de métier reste la diffusion de produits d’épargne destinés aux investisseurs particuliers, martèle Eric Cosserat. Notre objectif est, dans le cadre d’un plan de développement déterminé l’an passé à horizon 2021, d’atteindre 5 milliards d’euros d’actifs sous gestion, soit un doublement de taille. Cela passe par le développement de nos produits collectifs – PFO, PFO2 et PF1 – et par une plus grande proximité auprès des investisseurs institutionnels dans le cadre de mandats, d’OPPCI et de Clubs Deal. Par ailleurs, un produit thématique paneuropéen devrait être lancé prochainement, qui pourrait prendre la forme d’un OPCI les prochains mois. » Pour mener à bien ces objectifs, Eric Cosserat mise sur la collégialité avec un comité de direction composé de neuf personnes : « On ne réussit et on n’échoue jamais seul », indique-t-il.
Comme d’autres sociétés de gestion, le groupe Perial a également ouvert son horizon d’investissement en dehors de nos frontières : en Allemagne, en Hollande ou encore en Italie. « Cette année, les acquisitions en Europe devraient atteindre 40 %. Pour cela, nous avons renforcé nos équipes avec le recrutement d’un directeur juridique rompu aux acquisitions européennes. Dans tous les cas, il convient de ne pas acheter à n’importe quel prix. Notre expérience nous permet d’orienter nos investissements sur des actifs de qualité, sources de plus-value et générateurs de revenus pour distribuer un dividende régulier. Tous nos investissements sont conduits avec l’objectif de réaliser une performance durable, aussi bien sur le plan environnemental que sur le plan sociétal. Aujourd’hui, 30 % de notre patrimoine est déjà en ligne avec les nouvelles normes à respecter, d’ici fin 2020. Nous avons donc pris de l’avance ! »
Perial a également signé cette année les PRI (principes pour l’investissement responsable), une initiative des Nations unies visant à promouvoir l’intégration des enjeux ESG dans les décisions d’investissements ; ce qui illustre l’engagement total du groupe, que ce soit dans ses rapports avec l’ensemble des parties prenantes, locataires, collaborateurs, élus, partenaires, etc.
Créer de la performance durable, tel est le credo de Perial qui peut compter sur son indépendance. « Notre actionnariat stable et familial nous offre la possibilité de développer notre vision sur le long terme et d’être actifs sur les sous-jacents, souligne Eric Cosserat. Nous ne pratiquons pas la course au rendement, mais travaillons à bâtir, pour nos véhicules d’épargne, un patrimoine de grande qualité. »
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