DDA : une directive encore insuffisante malgré des avancées notables
Par Philippe Parguey, directeur général développement chez Nortia
« Big bang » en vue du côté des assureurs. DDA est entrée en application le 1er octobre 2018. Cette directive remet à plat les pratiques des assureurs en matière de rémunération et renforce les droits de leurs clients. La transférabilité de l’assurance-vie d’un établissement à un autre reste pourtant le chaînon manquant.
La directive DDA (Directive pour la distribution d’assurances) est entrée en vigueur le 1er octobre dernier. C’est un événement important pour l’ensemble de la profession. Or, le constat est sans appel : beaucoup de professionnels se déclarent encore mal informés et pas en mesure d’en appliquer les principales modalités. Il convient ici d’en rappeler les grands enjeux qui concernent aussi bien les distributeurs de produits d’assurances que leurs clients.
La directive DDA, dont l’application garantit une plus grande harmonisation des pratiques au niveau européen, s’applique à toutes les personnes dont l’activité consiste à fournir à des clients des services de distribution d’assurances ou de réassurances. Elle concerne ainsi aussi bien les assureurs vendant en direct leurs produits que les intermédiaires traditionnels (agents d’assurance, courtiers etc.). DDA vise à mieux protéger les intérêts des clients qui doivent souscrire ce type de produits sur la base d’informations objectives formulées de façon compréhensible par le distributeur.
La philosophie qui sous-tend cette avancée réglementaire peut se résumer ainsi : c’est celui qui conseille effectivement le client qui doit percevoir la rémunération. DDA vise également à prévenir les conflits d’intérêts. Les distributeurs de produits d’assurance sont tenus de renforcer leurs contrôles afin d’adapter précisément leurs conseils aux besoins et à la situation de la clientèle ciblée et d’informer celle-ci avec précision. En clair, le système de rémunération du distributeur ne doit pas l’inciter à recommander au client un produit plutôt qu’un autre au détriment de ses intérêts.
La fin de l’exception assurantielle française ?
En France, le système appliqué jusqu’à présent en matière de distribution d’assurances réalisée par des intermédiaires (courtiers) relevait d’une véritable « exception culturelle » ! Il stipulait que le courtier d’origine, celui qui était considéré comme l’apporteur de la police d’assurance, percevait la prime initiale ainsi que les primes ultérieures tout au long de la durée de vie du contrat (usage n°3 du courtage), même dans le cas où aucun véritable suivi n’était effectué par la suite. DDA doit mettre fin à cette « exception assurantielle française » injustifiée.
En obligeant les assureurs à remettre à plat leurs pratiques en matière de rémunération, cette directive s’oriente dans la bonne direction. Le système en vigueur qui a conduit à de nombreux abus n’avait plus lieu d’être. Le client aura ainsi la possibilité de reprendre véritablement le contrôle de son contrat en choisissant de rémunérer ceux qui le conseillent vraiment.
Dans le cadre du débat parlementaire autour de la loi Pacte, un député LaRem a déposé, par ailleurs, un amendement afin d’autoriser la transférabilité des contrats d’assurance-vie d’un assureur à un autre, sans perte de l’antériorité fiscale. Une mesure très bénéfique pour les clients désirant profiter de la concurrence entre assureurs. Néanmoins, Bercy, qui ne souhaite pas mettre en difficulté les grandes compagnies d’assurances à l’heure de l’adoption de la loi Pacte, a réaffirmé son refus d’une telle mesure. Il s’agit pourtant de l’avancée ultérieure que nous appelons de nos vœux. Souhaitons que cette mesure, plébiscitée par une majorité d’épargnants français, trouve une application respectueuse de l’équilibre des assureurs.
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