Pour une vraie mesure des CGP
Par François Almaleh, gérant du cabinet Finadoc
Beaucoup de chiffres circulent pour évaluer ce que représente la profession de CGP en France. Mais force est de constater qu’on ne peut mesurer son poids réel dans le paysage de l’épargne.
Si l’on sait qu’il y a 402 899 banquiers, selon la BCE, en France, en 2021, on estime le nombre de CGP à 4 500 pour 3 500 cabinets. Ces estimations viennent de la diversité des métiers et des recoupements de différentes habilitations professionnelles.
Une vision trop réglementaire du poids de la profession
Annuellement, à l’issue des « FRACIF » destinés à l’AMF, et autres informations demandées par les différentes chambres professionnelles (dont la répartition du chiffre d’affaires pour les ajustements des RC pro), on ne peut que déplorer que les statistiques diffusées en retour ne reflètent pas la réalité concrète de nos cabinets. Les données de synthèse diffusées par les agrégateurs, les plates-formes, l’AMF ou même les chambres professionnelles sont le fruit d’une lecture réglementaire de la profession qui répond à différents dispositifs. Nos métiers, comme les patrimoines de nos clients, sont globaux et croisés : le conseil en gestion de patrimoine facturé peut aboutir à des placements assurantiels, compte-titres, prévoyance… Comment intégrer une prestation d’honoraires d’allocation d’actifs au sein de comptes-titres et/ou d’assurance-vie ? Ça ne rentre dans aucune case de « collecte » ou d’encours, et pourtant cela génère du chiffre d’affaires.
Il conviendrait alors de centrer les statistiques de manière plus fiable sur encours collectés et gérés par famille de métier : encours comptes-titres, encours assurantiels, production et encours de crédit et de prévoyance, honoraires de conseils, ventes de produits immobiliers et de défiscalisation, par cabinet, par conseiller. Mais aussi de répartir la collecte nette de la collecte brute.
Par expérience vécue, les statistiques de tel ou tel groupement ou société agrégeant des données de CGP ne sont pas toujours, loin de là, actualisées. Un canevas plus formel inter-chambres permettrait de valider le poids concret des CGP en France.
Des tableaux de bord à mettre en place
Chaque conseiller en gestion de patrimoine est un entrepreneur, même dans les plus importantes structures. Dans chaque cabinet, au-delà des encours, ratios de base et des strates du chiffre d’affaires, il pourrait être utile de mesurer individuellement quelle part du patrimoine du client est gérée par le CGP.
Mais là des difficultés apparaissent : quelles données doit-on mesurer ? Le CGP suit-il 20 % des encours financiers du client ? 40 % de son patrimoine global ? Le CGP conseille-t-il aussi ses clients dirigeants d’entreprise sur leur patrimoine professionnel ? Dans le cas du patrimoine immobilier, quelle valeur prendre en compte : la valeur de marché ou la valeur patrimoniale ? Doit-on compter les clients nus-propriétaires ?
Le nombre moyen de conseillers par cabinet est une donnée a priori simple, mais c’est oublier qu’il existe des binômes par client, mais également des profils juniors qui n’ont pas toujours le même fonds de commerce qu’un profil senior. Mesurer aussi les clients à risque, à potentiel, inactifs, non rentables, non sollicités depuis un an…
La perception de notre profession
Avec une meilleure granularité statistique de nos métiers, c’est bien la profession dans son ensemble qui sera plus visible et mieux comprise de tous les clients. Ces statistiques devraient être axées principalement sur les effectifs front, middle, back, nos prestations facturées, les encours et la collecte, sans biais réglementaire. En espérant que les chambres professionnelles ajustent ainsi bien mieux la connaissance de leurs adhérents et la diffuse, ensemble (pari audacieux ?) au grand public.
Nous avons donc un rôle à jouer pour mieux justifier de notre poids et de notre développement dans le paysage français de l’épargne. Dire, avec raison, que les conseillers en gestion de patrimoine sont le premier cabinet de conseil en France ou la première « banque », doit se concrétiser en termes de perception et de chiffres fiables, économiques et non réglementaires. Et cela pour prouver la croissance des CGP et, in fine, de leur pertinence globale. Cela contribuerait certainement à des rapprochements de cabinets, et à la profession d’être plus visible et transparente dans la sphère financière française. Et naturellement en termes d’image de marque et de communication.
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