Parachutes dorés : il est temps d’encadrer sérieusement ces dispositifs
Par Jérôme Laurre, Managing Partner, Degroof Petercam Finance
Après la multiplication des polémiques sur les parachutes dorés, l’AMF appelle dans son rapport annuel 2015 à mieux encadrer ces rémunérations exceptionnelles.
Un commentaire qui s’inscrit dans la lignée de la récente décision des députés de réduire l’avantage fiscal accordé aux cadres et/ou managers bénéficiant de « packages » lors de leur départ. Le seuil de déclenchement de l’imposition sur le revenu a été abaissé de 228 000 à 114 000 euros. Le gouvernement semble disposé à retravailler la réglementation en vigueur. L’idée est d’encadrer davantage les plus gros parachutes dorés.
Le besoin de légiférer par le politique s’explique par un constat accablant : de Philippe Jaffré (Elf) en 1999 à Michel Combes (Alcatel-Lucent) ou Bruno Lafont (Lafarge) en 2015 en passant par Antoine Zacharias (Vinci) en 2006, la réputation de la place de Paris est ternie par des comportements individuels perçus comme une volonté d’enrichissement sans risque après un départ de l’entreprise.
L’urgence serait de définir des règles précises, fixées à l’avance avec des conditions de présence et de performance précises, fondées sur la création de valeur durant l’exercice de leur fonction par les dirigeants, pour justifier les rémunérations versées lors de leur départ, et ce qu’elle qu’en soit la forme (bonus, attributions d’actions ou de stock-options, etc.). Ces règles doivent être les mêmes pour tous, cadres dirigeants ou non, et personne ne doit pouvoir modifier son contrat une fois en poste dans l’entreprise ou ce qui est encore plus injustifiable, une fois le départ de l’entreprise acté.
Devoir de solidarité et de responsabilité
Dans ce contexte, il est nécessaire d’en appeler à la solidarité et à la responsabilité des dirigeants français pour ne pas s’accommoder de règles édictées a posteriori. Car la conséquence de ces agissements amène le pouvoir politique à renforcer les lois existantes sur ces « packages » qui concernent un nombre important de salariés et pas uniquement les grands dirigeants du Cac 40. En clair, le comportement irresponsable de quelques-uns amène le législateur à durcir le cadre fiscal de ces dispositifs et à pénaliser dans leur ensemble des cadres dirigeants ou des collaborateurs qui ne sont pas responsables de ces dérives. C’est ainsi que la fiscalité des stock-options s’est sensiblement durcie depuis 2008, conduisant à leur quasi disparition. Or, ce mode d’intéressement au capital aligne les intérêts des actionnaires et des managers puisque les bénéficiaires ne gagnent que si la valeur actionnariale augmente.
Ils mettent également en porte-à-faux les organisations de régulation AFEP (Association française des entreprises privées) et le Medef et conduisent l’AMF à devenir partie prenante aux discussions. Avec le risque que le politique devienne l’arbitre ultime de cette partie à haut risque.
Compte tenu du manque de visibilité sur les conditions des sommes attribuées et devant la multiplication des affaires de « parachutes dorés », il y a fort à parier que régulateurs et législateurs ne soient pas prêts de clore le dossier. Il est dans l’intérêt de la place de Paris que ces polémiques récurrentes cessent une bonne fois pour toutes.
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