L’AMF inflige une amende record à Natixis AM
35 millions d’euros, telle est la sanction jamais prononcée encore à un tel niveau par le gendarme de la Bourse ! En cause, le manquement des obligations professionnelles de la filiale du groupe BPCE dans la gestion de 133 fonds à formule entre 2012 et 2015.
Une décision qui fait figure d’exemple dans le paysage des sociétés de gestion française ! Par décision du 25 juillet, la commission des sanctions de l’AMF a infligé à Natixis Asset Management un avertissement et une sanction de 35 millions d’euros, la plus importante jamais prononcée par elle, pour avoir manqué à ses obligations professionnelles dans la gestion de fonds à formule entre 2012 et 2015.
Cent-trente-trois fonds à formule conçus et gérés par la société de gestion de portefeuille Natixis AM ont été contrôlés par le gendarme de la Bourse. Ces fonds offraient, à l’échéance, une garantie totale sur le capital initialement investi, ainsi qu’une performance prédéfinie par une formule mathématique. Pour chacun d’eux, Natixis Asset Management avait constitué une réserve appelée « coussin » qui était alimentée par une marge de structuration et une partie des commissions dues par les porteurs en cas de rachat anticipé de leurs parts. Selon la société de gestion, cette pratique était principalement destinée à prémunir les porteurs contre les risques réglementaires, opérationnels ou fiscaux non couverts par la garantie souscrite en vue d’assurer la restitution du capital à l’échéance.
Quatre manquements retenus
La commission des sanctions a alors retenu quatre manquements concernant les commissions de rachat revenant à certains des fonds contrôlés :
- l’information inexacte et trompeuse donnée par les prospectus des fonds, qui indiquaient que les commissions de rachat étaient « acquises » aux fonds pour moitié et servaient à compenser les frais supportés pour investir ou désinvestir les avoirs confiés, alors que ces commissions n’ont bénéficié aux fonds que dans certains cas et n’ont été qu’en partie destinées au paiement des frais, d’un montant moyen moins élevé ;
- la violation de l’obligation d’agir dans le seul intérêt des porteurs de parts et l’imposition à ces derniers de charges indues et injustifiées évaluées à 15,6 millions d’euros en raison du transfert quasi-immédiat des commissions de rachat nettes de l’actif net des fonds à un compte de dette, opération qui a entraîné une diminution de la valeur liquidative des fonds et l’inscription sur un compte dont Natixis Asset Management était l’unique bénéficiaire ;
- le dépassement du taux maximum de frais de gestion prévu par les prospectus à concurrence d’un montant total de 3,6 millions d’euros, calculé en réintégrant parmi ces frais au titre des exercices concernés les commissions de rachat portées en compte de dette des fonds, et devenues par cette opération constitutives d’une rémunération pour Natixis Asset Management ;
- et « la délivrance d’une information ne présentant pas un caractère exact, clair et non trompeur par les rapports annuels des fonds, à défaut d’inclure le montant des commissions de rachat parmi les frais de gestion ».
La commission des sanctions a également retenu, pour certains des fonds contrôlés, deux manquements relatifs à la marge de structuration : le dépassement, au cours du dernier exercice des fonds, du taux maximum de frais de gestion prévu par les prospectus à concurrence d’un montant total de 12,5 millions d’euros, calculé en réintégrant parmi ces frais le reliquat de la marge de structuration, dont Natixis Asset Management a disposé librement à l’échéance des fonds lorsque la formule garantie était atteinte et qui, ainsi, s’analysait en une rémunération.
A cet égard, le gendarme de la Bourse a considéré, « d’une part, que le taux maximum de frais de gestion devait être apprécié par exercice et non sur la durée de vie du fonds et, d’autre part, qu’une fois atteint le taux maximum de frais de gestion indiqué dans les prospectus, Natixis Asset Management aurait dû faire bénéficier les porteurs du reliquat de la marge de structuration plutôt que de se l’approprier : la délivrance d’une information ne présentant pas un caractère exact, clair et non trompeur par les rapports annuels des fonds concernés, faute d’intégrer le montant du reliquat de la marge de structuration parmi les frais de gestion ».
Pour déterminer la sanction, la commission a tenu compte de la gravité et de la durée des manquements, ainsi que de l’importance des montants en jeu.
Cette décision peut faire l’objet d’un recours. Et c’est bien ce que compte faire Mathieu Duncan, directeur général de Natixis AM, qui a dévoilé dans une interview parue dans Challenges le 26 juillet que la société de gestion comptait « faire appel devant le Conseil d’Etat », en regrettant « une décision injustifiée et disproportionnée ».
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