Optimisation fiscale : avez-vous pensé au démembrement de propriété des parts de SCI ?
Par Nathalie Chour, juriste, sous la direction de maître Steve Jakubowski, avocat; cabinet Avocats Picovschi (www.avocats-picovschi.com)
Investir dans l’immobilier par l’intermédiaire d’une société civile immobilière (SCI) présente de nombreux avantages juridiques et patrimoniaux, et permet le plus souvent de réduire le coût fiscal de l’opération. Variées sont les techniques. Le démembrement de propriété des parts sociales de la SCI reste l’une des plus prisées, ce mécanisme d’optimisation fiscale ayant reçu l’aval des juges au vu des décisions jurisprudentielles.
Deux types de démembrement peuvent être envisagés. L’un consiste en la cession temporaire de l’usufruit des parts de la SCI au profit d’une entité juridique, et ce pour se protéger contre les risques de l’activité sociétale et réduire les frais de location (I). L’autre vise l’optique de la transmission de patrimoine (réduire les frais et impositions) par l’abandon de la nue-propriété au profit des bénéficiaires (II).
I – Réduire les charges et coûts de l’activité par la cession temporaire de l’usufruit des parts de la SCI
Le démembrement de propriété d’immeubles détenus par une société au profit d’un tiers, pratique ayant reçu un aval tardif des juges (Com. 18/12/12, n°11-27745), est souvent préféré pour des raisons d’ordre juridique, patrimonial (contrer les aléas et risques liés à l’activité) et fiscal.
Peu importe le propriétaire des biens (gérant ou SCI), l’usufruit des parts de la société va être cédé au profit d’une société d’exploitation (usufruitière) et ce, à des fins d’optimisation fiscale. Ainsi, l’usufruitière bénéficiera d’un amortissement de son droit d’usufruit sur l’immeuble (art. 238 bis K CGI) se traduisant par une meilleure maîtrise du budget locatif à long terme et l’absence d’imposition sur une plus-value à l’issue de l’opération.
Céder l’usufruit des parts ouvre droit à d’autres avantages fiscaux, tels les abattements (art. 150VC CGI), l’option entre impôt sur les sociétés (IS) et impôts sur le revenu (IR) (selon que l’on soit en présence d’une SCI translucide ou transparente – art. 8 et 239 CGI). Si le nu-propriétaire est redevable de l’impôt sur la fortune (ISF), le démembrement lui permettra d’en échapper ; l’usufruitier devra déclarer la valeur du bien en pleine propriété.
Cette méthode peut paraître attractive à condition d’être assisté par un conseil fiscaliste afin d’éviter une requalification et un éventuel redressement fiscal. Il faudra faire attention à la valorisation des parts de la SCI, le fisc ne vous laissera pas passer.
Suite à la modification de l’article 13, 5° du CGI (loi de finances rectificative 2012, n° 2012-1510), cette technique d’optimisation est moins usitée. Il ne faut pas oublier que ce mécanisme reste un moyen sûr pour se constituer des revenus, un patrimoine futur et anticiper leur transmission aux héritiers.
II – Organiser la transmission de son patrimoine : la cession de la nue-propriété.
Au vu des avantages que peut procurer la cession de la nue-propriété, telle que la réduction des droits d’enregistrement et de donation (déjouer l’art 669 CGI), et de la légitimité que lui reconnaissent les juges, les particuliers n’hésitent plus à passer le cap.
Plusieurs étapes à franchir, débutant par la constitution d’une SCI par le donateur. Celui-ci va céder au profit de la SCI des biens immobiliers ou en acquérir par son biais. S’il a choisi la seconde option, la société contractera des crédits pour financer les biens, qui vont être répercutés sur le calcul des droits de mutation en cas de donation de la nue-propriété. Les taxes, impositions et droits seront amoindris en raison de la faible valeur des parts sociales. Sauf convention contraire, céder la nue-propriété n’emporte pas cession de la gérance.
Par le décès de l’usufruitier (art. 617 C. civ.), le donataire réunira sur sa tête les qualités d’usufruitier et de nu-propriétaire et bénéficiera d’une réduction des droits et impôts à payer (art. 1133 CGI). L’administration fera échec à l’opération si le décès de l’usufruitier est intervenu dans les trois mois suivant la donation.
Si recourir au démembrement présente quelques inconvénients comme la privation des droits au logement du conjoint survivant (art. 763 et 764 C. civ.), ce mécanisme bénéficie toutefois d’une protection de la Cour de cassation (Ass. plé. 02/10/15, n°14-14256) rappelant qu’il s’agit d’un mode de transmission permettant de réduire les droits de succession.
Ainsi, que vous soyez une entité juridique ou un particulier, pensez au démembrement des parts de SCI comme moyen d’optimisation juridique, patrimoniale et fiscale !
Source: « Pas de bal tragique au Comité de l’abus de droit: la cession d’usufruit temporaire n’est pas morte », BENOUDIZ, Revue de droit fiscal, 21/05/15, n°21, 312.
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