Décès et déclarations fiscales pour les revenus et le patrimoine

Par : edicom

Par Stéphane Absolu, associé-fondateur de Pyxis Conseil

En cas de décès, il appartient aux héritiers de faire les déclarations d’impôt sur le revenu et d’impôt sur la fortune pour le compte du parent ou conjoint décédé. De nombreuses questions sont alors soulevées : de quel délai disposent-ils ? Quelles sont les modalités déclaratives ? En cas d’imposition commune, comment répartir les revenus entre la déclaration commune et la déclaration du conjoint survivant ?

Autant de questions complexes que nous vous proposons de synthétiser dans ce petit guide pratique qui reprendra les obligations fiscales qui incombent aux héritiers, tout d’abord l’année du décès, puis l’année suivante.

L’année du décès

En premier lieu et sauf cas particuliers, la déclaration de succession doit être déposée par les héritiers dans les six mois du décès au centre des impôts duquel dépendait le défunt.

Le prélèvement à la source

Si le défunt était soumis à une imposition commune, le conjoint ou partenaire de Pacs doit signaler le changement de situation dans un délai de soixante jours, à compter du décès depuis son espace fiscal dans l’onglet « Gérer mon prélèvement à la source », puis « Signaler un changement ».

L’administration fiscale détermine ensuite deux nouveaux taux :

- un premier qui s’appliquera dans les trois mois suivant cette déclaration et jusqu’au 31 décembre de l’année du décès ;

- un second qui s’appliquera du 1er janvier au 31 août de l’année suivant celle du décès. Ce taux sera déterminé compte tenu de la situation du foyer suite au décès.

Ultérieurement, le taux sera calculé « classiquement », compte tenu des revenus que le conjoint ou partenaire survivant déclarera.

Les prélèvements automatiques

Si un contrat de prélèvement automatique (mensuel ou annuel) avait été mis en place par le défunt, il convient de le résilier afin d’éviter des incidents de prélèvement.

Pour pallier les risques de non-paiement, si le défunt était soumis à imposition commune, le conjoint ou le partenaire de Pacs peut changer les coordonnées bancaires de prélèvement sur son espace fiscal depuis l’onglet « Paiements », « Gérer mes contrats de prélèvement », puis « Modifier mes coordonnées bancaires ».

L’année suivant le décès

L’obligation de déclaration des revenus

Si la personne décédée était célibataire (veuf ou divorcé), la déclaration d’impôt est établie au nom des héritiers, à savoir de l’indivision successorale dans l’hypothèse d’héritiers multiples. L’imposition est alors indirectement supportée par les héritiers du défunt et constitue un passif déductible pour le calcul des droits de succession.

Par contre, si le défunt était marié ou pacsé, et donc soumis à une imposition commune, la déclaration est établie par le conjoint ou partenaire survivant. Par ailleurs, il devra remplir une déclaration pour ses seuls revenus pour la période postérieure au décès.

Au titre de la déclaration commune, l’époux est tenu solidairement au paiement de l’impôt. Ainsi, s’ils étaient mariés sous un régime communautaire, l’impôt dû est un passif de communauté. Lors de la réception de l’avis d’impôt, le conjoint survivant règle le tout. Si les époux étaient mariés ou pacsés sous un régime séparatiste, sauf à recevoir la succession en usufruit, le conjoint survivant peut en principe demander aux héritiers à être remboursé à hauteur de l’imposition due par le défunt (à due proportion de ses revenus).

Exemple : un contribuable marié sous le régime de la séparation de biens décède. L’imposition due au titre de l’imposition commune est de 20 000 euros. Son conjoint opte pour le quart en pleine propriété de la succession. On suppose que leurs revenus au titre de la période d’imposition commune étaient équivalents (en d’autres termes, que chaque époux est redevable de 10 000 euros d’impôt sur le revenu).

A la réception de l’avis d’imposition, le conjoint survivant règle 20 000 euros. Il lui est en principe possible de demander aux héritiers du défunt le remboursement de la part qui a été inscrite au passif successoral, soit : 20 000 euros x 50 % (part de l’imposition de laquelle le défunt était redevable) x ¾ (part appréhendée par les héritiers) = 7 500 euros.

Les héritiers doivent déclarer les revenus du défunt avant la date limite ordinaire de dépôt des déclarations (variables selon le département de résidence du défunt). En revanche, par dérogation, les déclarations bénéfice industriel et commercial (BIC), bénéfice non commercial (BNC) et bénéfice agricole (BA) doivent être produites dans les six mois du décès.

En pratique, en cas de déclaration en ligne, les héritiers peuvent déclarer le décès et modifier le compte bancaire attaché au numéro fiscal (pour y substituer leur relevé d’identité bancaire) afin de percevoir ou d’être prélevés du solde de l’impôt.

L’enjeu autour de la détermination des revenus à imposer

La déclaration au nom du défunt comprend les revenus perçus du 1er janvier jusqu’à la date de son décès. Pour les revenus perçus ultérieurement, ils sont à déclarer au sein de la déclaration des héritiers (et notamment du conjoint survivant). Par exemple, en présence d’un bien locatif détenu en indivision par les héritiers du défunt, chacun doit en déclarer sa quote-part.

Ainsi, si le défunt exerçait une activité professionnelle, en tant qu’indépendant, ou salarié, sa déclaration doit comprendre les bénéfices (BIC, BNC, BA) ou les traitements et salaires, réalisés jusqu’à la date de décès et non encore imposés, en ce compris les plus-values latentes le cas échéant.

Concernant les locations nues, les revenus à déclarer sont ceux encaissés du 1er janvier jusqu’à la date de décès, et le cas échéant les revenus correspondant à des périodes de location courant du 1er janvier jusqu’au jour du décès même s’ils n’ont été encaissés que postérieurement au décès.

Exemples : un contribuable met en location nue un bien pour un loyer mensuel de 1 000 euros.

Cas 1 : il décède le 8 avril, et son locataire ne règle le loyer au titre du mois d’avril que le 10 avril.

Le dernier loyer doit être proratisé. Le loyer qui correspond à la période de location courant du 1er avril au jour du décès, et donc qui est à déclarer dans la déclaration du défunt, est de 266, 67 euros [1 000 euros x (8/30 jours)].

Cas 2 : il décède le 10 avril, et son locataire règle le loyer au titre du mois d’avril le 5 avril. Le loyer à déclarer dans la déclaration du défunt est de 1 000 euros.

Parallèlement, les charges déductibles sont les charges effectivement acquittées par le défunt entre le 1er janvier et son décès, les dépenses qui ont été engagées mais non acquittées avant son décès et la taxe foncière due au 1er janvier, quand bien même son recouvrement n’intervient que postérieurement au décès.

Le sort des réductions et crédits d’impôt

Les dépenses ouvrant droit à une réduction ou à un crédit d’impôt ponctuel (don, Cesu, souscription au capital de PME, etc.) sont à renseigner dans la déclaration du défunt si elles ont été acquittées entre le 1er janvier et la date du décès.

Les réductions d’impôt récurrentes (type Pinel, Scellier, Malraux) ne sont pas remises en cause par le décès du contribuable. Plus largement, dans l’hypothèse d’un décès sous engagement de conservation et de location d’un bien sous dispositif de défiscalisation immobilière, le conjoint survivant soumis à imposition commune peut reprendre l’engagement à son nom pour la durée restant à courir s’il est attributaire du bien en pleine-propriété ou en usufruit. Il doit alors joindre une note à l’administration fiscale à la déclaration des revenus souscrite au titre de l’année du décès. Attention cependant, il ne pourra pas reprendre l’engagement de location s’il n’est attributaire que d’une quote-part indivise du bien.

Une année de doubles déclarations : déclaration commune et déclaration du conjoint survivant

Deux déclarations d’impôt sont établies l’année du décès, en se connectant avec le numéro fiscal du survivant :

- une déclaration commune contenant les revenus des époux ou partenaires de Pacs du 1er janvier à la date du décès. Il convient de modifier les informations préremplies concernant les revenus du survivant et les retenues à la source prélevées au titre du prélèvement à la source (afin d’y soustraire les revenus et retenues à la source correspondant à la période après décès). Pour cette déclaration commune, le quotient familial, le nombre de parts et les charges de famille sont appréciés au 1er janvier ;

- et une déclaration au nom du seul survivant contenant les revenus du survivant de la date du décès jusqu’au 31 décembre. Pour cette deuxième déclaration, aucun revenu n’est prérempli. Il convient d’ajouter les retenues à la source prélevées au titre du prélèvement à la source de la date du décès au 31 décembre. Concernant le quotient familial, le nombre de parts et les charges de famille, ils sont appréciés au 1er janvier ou au 31 décembre si c’est plus favorable.

Le constat est délicat, en effet cette phase déjà douloureuse pour les proches s’accompagne d’un process déclaratif plutôt complexe : l’obligation pour le conjoint de déposer deux déclarations, la répartition des charges et des revenus, la gestion des prélèvements…

Autant d’enjeux pour lesquels l’accompagnement d’un conseil dans la réalisation des déclarations fiscales l’année du décès est préconisé.

  • Mise à jour le : 24/06/2024

Vos réactions