Année lombarde : réprobation jurisprudentielle d’une pratique
Certaines banques, pour diverses raisons, utilisent une année de 360 jours au lieu de 365 pour déterminer le montant que des débiteurs immobiliers leur doivent. Force est de constater, qu’aujourd’hui encore, la jurisprudence se montre généralement défavorable à cette pratique.
Les banquiers lombards du Moyen-Age auraient, s’ils se savaient à ce point initiateurs d’une pratique régulièrement sanctionnée par les juges français, loisir de se retourner dans leur tombe. Servant de calcul aux intérêts de prêts souscrits auprès de certaines banques, cette méthode n’est pas sans conséquence sur le montant des intérêts des prêts immobiliers des particuliers dans l’hypothèse d’un remboursement partiel ou anticipé.
Déchéance du TEG conventionnel
Après un bruisssement jurisprudentiel en 1995 sanctionnant l’usage des 360 jours, un arrêt de la première chambre civile de la cour de cassation en date du 19 juin 2013 (n°12-16.651) posait , que « le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile ». Cette position de principe a été réaffirmée par la suite dans de nombreuses décisions. Parfois, la nullité frappera la simple clause stipulant (Cour d’appel de Paris, 27 janvier 2017) « que le montant net des intérêts est calculé au jour le jour sur le solde du compte en prenant en considération une année de 360 jours » entraînant un calcul erroné des intérêts.
Argumentation bancaire persistante
La directive 98/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 précise que « l’écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou fraction d’années. Une année compte 365 jours, ou pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés. Un mois normalisé compte 30,41666 (c’est à dire 365/12), que l’année soit bissextile ou non ».
Des banques arguent, pourtant, du fait que le calcul des intérêts conventionnels serait basé sur une moyenne de jours par mois lissés sur l’année civile. De sorte que le résultat serait le même que les intérêts soient calculés sur 360 ou sur 365 jours. La Cour d’appel (12 janvier 2017, Pôle 4, chambre 8) n’en démord pas. Elle estime que si l’acte de prêt prévoit que le TEG est calculé sur 365 jours conformément aux prescriptions réglementaires, la stipulation concernant le taux conventionnel vise une période de 360 jours, et se trouve frappé de nullité, peu important que la banque soutienne l’absence de surcoût d’intérêts ou l’équivalence des calculs.
Si des nombreuses décisions continuent d’être rendues en faveur de l’emprunteur, rien n’indique que les praticiens de l’année lombarde cesseront d’opposer une résistance dans le cadre des crédits immobiliers aux particuliers. Un constat s'impose : le réflexe conditionné de Pavlov joue peu au sein des banques.
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