Leenby, l’intelligente artificielle
Cybedroïd, la start-up française spécialisée en robotique, est en passe de finaliser sa nouvelle levée de fonds de 600 000 € pour accélérer la production de sa petite humanoïde, Leenby. Objectif : passer à la fabrication de deux robots par mois à cinq, d’ici la fin de l’année.
Derrière chaque rêve de gosse se cachent de jolies pépites. Des rivières qui se transforment en torrent et des étincelles en feu vif. L’aventure de Leenby, ce petit robot – ou plutôt robote – pas plus haut qu’1,40 mètre, à la plate-forme roulante et destinée à l’assistance de son heureux propriétaire, est née comme ça. D’un rêve de gosse.
100 % française, pensée, conçue, imaginée, développée et fabriquée à Limoges, la petite humanoïde, dernière-née de la start-up Cybedroïd a déjà fait sensation au salon Innorobo 2017, en mai dernier, le rendez-vous incontournable du secteur, le plus grand salon français dédié à la robotique. Derrière ces superlatifs, l’ingénieuse idée de trois hommes. Trois copains dans la vie, fanas de robots, d’humanoïdes et d’intelligence artificielle, qui ont mis leur talent, leur passion – et tout leur pécule – en cofondant la société Cybedroïd en novembre 2011 : Fabien Raimbault, directeur, Jean-Philippe Fournier, directeur financier, et Miguil Abdillahi, directeur technique.
Le futur est déjà là
« Je suis passionné de robot depuis vingt-cinq ans », lance Fabien Raimbault, ancien ingénieur informatique de 37 ans, qui a tout quitté pour monter sa petite entreprise, dont il est aujourd’hui le directeur, aux côtés de ses deux compères d’aventure. « On a ensuite créé l’association Caliban en 2008, poursuit le jeune homme, dans le but de promouvoir et de démocratiser la robotique. J’en ai été le président jusqu’en 2016. On a commencé à faire des salons dédiés, ouvrir des portes des laboratoires pour leur présenter le fruit de notre travail, des prototypes de robots que nous fabriquions le soir après le travail sur la table de la cuisine… » Et face au succès, les trois amis créent Cybedroïd (« cybe », pour cybénétique et « droïd » pour Androïd), en 2011, pour conduire leur « vision d’un monde où les robots pourraient soulager les êtres humains de tâches souveraines, les soutenir dans leur vie quotidienne et, finalement, offrir de la compagnie et de l’aide ».
Ils lancent d’abord le robot prototype Ariel, un démonstrateur pour lequel Bpifrance commence à les suivre et à les soutenir financièrement. Puis viendra Aria, un robot plus abouti que sa grande sœur, en mode plan projet, que la société présentera à Innorobo 2013, soit deux petites années seulement après sa création… Et c’est là qu’un investisseur privé, séduit par le concept, les soutiendra et investira une belle somme… Qui leur permettra de « rattraper notre retard sur nos concurrents, en particulier espagnols, se réjouit Fabien Raimbault, et de poursuivre notre R&D. Car Aria n’était pas carrossé et mesurait 1,70 m. Nous l’avons rationalisée en lançant Leena, seulement 1,40 m de haut, cette fois entièrement carrossée, plus sûre et plus aboutie au niveau de ses applications… »
Robot de 5e génération
Leena est finalement prête pour être présentée à Innorobo 2015. Puis viendra sa petite sœur, Leenby, pour Innorobo 2016, puis une version plus aboutie encore pour l’édition 2017 du salon de la robotique.
Dans le détail, Leenby, la dernière génération de Cybedroïd et le robot de 5e génération, est un semi-humanoïde mobile et autonome capable de s’orienter dans un environnement public. Ce projet ambitieux a été lancé pour répondre aux besoins des personnes âgées et handicapées, à la maison ou dans un environnement médical. C’est pour cela que Leenby est labellisée Silver Economie.
La liste des tâches potentielles que Leenby pourrait exécuter comprend l’escorte d’une personne dans sa chambre, la livraison de nourriture et de boissons, la détection d’une personne en danger immédiat, et la formulation de la bonne solution, l’interaction avec la personne et la sécurisation de son environnement. Leenby est également équipée d’une reconnaissance et d’une synthèse vocale basée sur des mots-clés qui lui permettent d’interagir avec un individu. Bien qu’elle soit conçue pour fonctionner de manière autonome, elle peut se connecter à différents réseaux (Ethernet local, Bluetooth, Wi-Fi, mobile 4G).
Du haut de son 1,40 m pour 30 petits kilos seulement et ses 20 degrés de liberté, Leenby est une plate-forme mobile capable de grimper sur une pente de 14 %. Grâce à deux capteurs et un système de caméras de vision, la petite robote est capable de se rendre compte de son environnement, de reconnaître des objets et de détecter les personnes : elle peut se diriger vers un objet pour le saisir et le remettre à une personne désignée. Le cadre innovant autoportant – la belle carrosserie – de Leenby protège tous ses composants, ce qui permet à l’enveloppe extérieure d’être adaptée à diverses esthétiques.
Une nouvelle levée de fonds pour développer sa fabrication
Pensée pour être produite en série, Leenby est aujourd’hui assez aboutie : « il faut visualiser nos robots comme un smartphone, confie Fabien Raimbault. Leenby est totalement intégrée : elle sait voir, entendre, parler, se mouvoir et se connecter à un réseau Internet. Elle est aujourd’hui intégrateur pour des Ehpad, pour des banques afin de gérer les files d’attente aux guichets et pour les particuliers. Ils sont une trentaine à en posséder. En effet, totalement personnalisable, Leenby peut servir de majordome à domicile : elle peut assurer le secrétariat, accueillir les invités, servir le vin à table… »
Et pour répondre à une demande qui ne cesse d’être exponentielle, Cybedroïd est en phase de finalisation de sa quatrième levée de fonds : 500 000 € pour la première, 200 000 € pour la deuxième et la troisième, et aujourd’hui 600 000 € auprès de Business Angels. L’objectif : produire en petite série dans les locaux même de l’entreprise de 500 m2 dans le quartier de la gare de Limoges, non plus deux Leenby par mois, mais cinq ! « Pour l’heure, nous comptons encore quatorze personnes, mais nous sommes en phase de recrutement pour accompagner notre développement, confie Fabien Raimbault. Avec cette nouvelle levée de fonds, nous allons pouvoir produire en petites séries et continuer à financer notre R&D. Dans le secteur de la robotique, c’est une course perpétuelle contre nos concurrents espagnols, américains et sud-coréens. Notre marché restera, pour l’instant, français. Mais nous n’excluons pas le marché européen : l’Italie et l’Allemagne, en priorité, puis l’Angleterre, avant de s’attaquer à l’international au Brésil dans quelques mois. Nos clients franco-français, qui deviennent nos amis, sont des bêta-testeurs : on les accompagne, on prend en compte leurs attentes et leurs remarques pour modifier sans cesse Leenby et accroître ses possibilités. »
En France, Cybedroïd a su se construire sur des bases saines. Elle compte bien lancer ses premiers robots en Italie en 2018… C’est-à-dire demain, quoi.
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