La loi Pacte devrait redonner un second souffle à l’épargne-retraite
Par Bertrand Tourmente, fondateur d’Althos Patrimoine
En instaurant un nouveau produit d’épargne-retraite, la loi Pacte redonne un second souffle à l’épargne-retraite. Mais du fait des incertitudes sur les aspects fiscaux de ce nouveau PER, l’épargnant doit encore faire preuve de vigilance, prévient Bertrand Tourmente, fondateur d’Althos Patrimoine dans une tribune.
En instaurant un nouveau produit d’épargne-retraite (PER) et en généralisant la sortie en capital, la loi Pacte est de nature à redonner un second souffle à un marché de l’épargne-retraite balbutiant. Du fait des incertitudes sur les aspects fiscaux de ce nouveau PER, l’épargnant doit encore faire preuve de vigilance voire d’attentisme à l’heure de choisir son futur placement de retraite.
L’épargne-retraite va-t-elle enfin trouver grâce aux yeux des Français ? Depuis plusieurs années, les pouvoirs publics ont en effet multiplié les initiatives – lancement de nouveaux produits, évolutions de la fiscalité, … – afin de dynamiser un marché balbutiant. Force est de constater que le succès a été, jusque-là, très mitigé. Les produits d’épargne-retraite restent très largement délaissés par les épargnants. Avec un peu plus de 200 milliards d’euros d’encours actuellement, l’épargne-retraite se situe encore très loin de l’assurance-vie (1.700 milliards d’encours), qui demeure le placement préféré des Français pour préparer leur retraite.
Il faut bien avouer que le marché de l’épargne-retraite souffrait, jusqu’à présent, d’un manque criant de visibilité. Le paysage français se caractérise en effet par une kyrielle de produits (Perco, Article 83, contrat Madelin, PERP…) et de dispositifs, tant individuels que collectifs, obéissant à des modalités et une fiscalité hétéroclites. Difficile donc pour l’épargnant de s’y retrouver dans cette jungle de produits. Résultat : les produits d’épargne-retraite restent encore largement méconnus et boudés alors qu’ils sont pourtant nécessaires en vue de préparer sa retraite.
Généralisation de la sortie en capital
L’adoption de la loi Pacte, le 11 avril dernier, devrait radicalement changer la donne. Telle est du moins son ambition. En instaurant un nouveau plan d’épargne retraite (PER), le législateur vise clairement à harmoniser et rationaliser le paysage de l’épargne-retraite afin de rendre ces produits plus attractifs et, donc, leur redonner un second souffle. Ce nouveau PER regroupera l’ensemble des dispositifs existants et sera régi par des règles communes. Concrètement, il faudra distinguer les PER d’entreprise, d’une part, qui remplaceront notamment les Perco, et les PER individuels de l’autre qui rassembleront les anciens PERP et contrat Madelin. On ne peut que saluer cette initiative qui s’inscrit dans la volonté du gouvernement de favoriser l’épargne de long terme et, par ricochet, de flécher l’épargne des Français vers l’économie productivité et le développement des entreprises nationales.
La principale innovation de ce nouveau PER réside dans la possibilité offerte à l’ensemble des épargnants de choisir entre une sortie en capital ou en rente viagère. Cette généralisation de la sortie en capital pour tous les produits d’épargne-retraite constitue une véritable révolution. Jusqu’à présent, la sortie en rente viagère était en effet obligatoire, notamment pour le PERP (même si une sortie partielle en capital était possible à hauteur de 20%) ou le contrat Madelin. Pour des Français peu adeptes de la rente viagère, la suppression de cette obligation constitue une réelle bonne nouvelle et elle devrait être de nature à déplafonner la collecte pour les produits d’épargne retraite. La mise en place de cette option devrait donc redynamiser l’épargne-retraite, au point d’en faire un concurrent sérieux à l’assurance-vie.
Zones d’ombre sur la fiscalité
Malgré des innovations majeures, l’heure est encore à la prudence et à la vigilance sur ce nouveau PER, notamment du fait que rien n’est encore fixé à ce stade sur les aspects fiscaux de ce nouveau produit. Le projet d’ordonnance, récemment dévoilé par le gouvernement, n’a pas permis de lever le voile sur les modalités fiscales de ce PER. Les concertations vont bon train avec les professionnels. Toutefois, le gouvernement semble parti pour conserver le dispositif fiscal actuel du PERP. Autant dire qu’il ne faut pas s’attendre à un grand soir fiscal sur les produits d’épargne-retraite. En raison de ces zones d’ombre sur la fiscalité du PER, il est fortement conseillé aux épargnants de ne rien faire, y compris de geler les éventuels versements sur leur PERP.
Surtout, avant de se précipiter vers ce nouveau produit d’épargne retraite, les épargnants seraient bien inspirés de laisser du temps aux assureurs et aux gestionnaires d’actifs de structurer leurs offres afin de faire jouer la concurrence. Il faudra également s’assurer que ces nouveaux PER puissent facilement se comparer entre eux à l’heure de faire son choix de placement financier. Un enjeu loin d’être anodin sur un marché où, jusque-là, il a toujours été extrêmement compliqué de comparer les multiples produits d’épargne-retraite disponibles sur le marché.
Malgré cet attentisme de bon aloi pour les épargnants, la loi Pacte constitue une réelle bonne nouvelle pour les épargnants soucieux d’anticiper et de préparer au mieux leur retraite. Reste désormais à transformer l’essai afin que cette nouvelle offre redynamise enfin un marché de l’épargne-retraite jusqu’ici moribond.
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