Emprunt de l’entreprise : privilégier la clause séquestre
Par Benoît Berchebru, directeur du service ingénierie patrimoniale
La clause séquestre permet de garantir un emprunt bancaire et de conserver dans l’actif de succession et dans les comptes de la société, une dette venant diminuer la valeur des titres et donc l’assiette des droits de succession au décès de l’emprunteur, ainsi que l’impôt sur les sociétés pour l’entreprise, ce que ne permet pas la clause standard d’une garantie emprunteur.
La clause séquestre apparait donc être un très bel outil d’optimisation mais souvent peu utilisé et mal maitrisé.
Principe de la garantie emprunteur
Dans le cadre d’un financement bancaire, la banque impose à l’emprunteur de souscrire à son profit, une assurance décès invalidité sur la tête du dirigeant.
En cas de survenance du risque assuré (décès, invalidité du chef d’entreprise), l’assureur verse le capital restant dû à la banque, et la dette s’éteint.
Conséquence : puisqu’il n’existe plus de dettes, la valeur des titres de la société, et par voie de conséquence, le montant des droits de succession, s’en retrouvent augmentés d’autant.
Côté entreprise, l’extinction de la dette par le remboursement de l’assurance emprunteur constitue un revenu exceptionnel au plan fiscal pour la société, ce revenu étant soumis à l’impôt sur les sociétés avec possibilité de lisser ce résultat exceptionnel sur 5 années.
Les 4 avantages de la clause séquestre (arrêt Musel*)
Fonctionnement : La société souscrit un prêt auprès d’une banque ainsi qu’une assurance décès invalidité avec une clause séquestre au profit d’un tiers, en lieu et place de la clause standard du contrat emprunteur. Le chef d’entreprise est toujours la tête assurée puisqu’il s’agit d’une garantie emprunteur. La différence est que le bénéficiaire de l’assurance décès invalidité n’est pas directement la banque mais un tiers séquestre (notaire, avocat…).
Lors de la survenance du risque assuré (ex. : décès), le tiers séquestre perçoit le montant du capital assuré restant dû et le met sous séquestre. Ce dernier sera utilisé pour rembourser la banque uniquement en cas de défaut de paiement des échéances du prêt puisque l’entreprise continue d’exister et de générer des revenus qui viendront rembourser le prêt, malgré le décès du chef d’entreprise. Et en l’absence de défaut de paiement des échéances par l’entreprise, le séquestre n’est pas utilisé.
Alors pourquoi se précipiter pour rembourser le prêt ? Cela n’a aucune logique ni économique, ni fiscale.
1er avantage : En cas de survenance du sinistre, il n’y a pas de revenus exceptionnels pour la société, ni d’augmentation immédiate de la valeur des titres de la société puisque la dette n’est pas éteinte en l’absence de remboursement de la banque, les fonds assurés étant remis au tiers séquestre et non à la banque directement.
La clause séquestre permet ainsi d’économiser jusqu’à 45% de droits de succession et 28% d’impôt sur les sociétés comparativement à une garantie décès emprunteur classique.
2ème avantage : L’existence même de l’entreprise est garantie et n’est pas remise en cause pour des questions d’ordre fiscal.
3ème avantage : La banque est couverte de la même façon qu’une garantie emprunteur standard.
4ème avantage : Lors du remboursement total du prêt par la société (à l’échéance), le compte séquestre est libéré, et les fonds non utilisés sont versés aux héritiers, sans aucun droits de succession, ni plafond.
Même si en pratique, les banques préfèrent être directement bénéficiaires des capitaux de l’assurance emprunteur (par souci de simplicité), demander la mise en place d’une clause séquestre peut s’avérer être très efficace et avantageux pour toutes les parties :
- La banque : qui continue à percevoir les intérêts et le remboursement du capital prêté
- L’assureur : qui perçoit les primes d’assurance
- L’entreprise : qui ne se voit pas imputer le résultat exceptionnel et continue à placer en charge les intérêts du crédit ainsi que les cotisations d’assurance.
- Les héritiers : qui bénéficient d’une diminution immédiate des droits de succession et d’une transmission des sommes sous séquestre totalement exonéré.
En cas de mise en place d’un prêt bancaire, il apparait donc préférable de retenir la banque qui accepte la clause séquestre avec un taux d’emprunt légèrement plus important, que la banque qui proposerait un taux meilleur sans accepter la clause séquestre. Car au final, vous aurez gagné sur le taux, mais vos héritiers le paieront bien plus cher fiscalement sur les droits de succession et l’impôt sur les sociétés à payer, sans pouvoir recevoir en complément une somme défiscalisée sans plafond (séquestre).
S’assurer en tant que chef d’entreprise avec une clause séquestre pour les prêts souscrits est donc une très bonne stratégie patrimoniale avec de nombreux avantages civils, fiscaux et économiques.
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