H2O dans la tourmente : les professionnels du marché réagissent
Alors que la société de gestion fondée par Bruno Crastres est dans la tourmente depuis la parution de l’article « H2O Asset Management: illiquid love » sur le site du Financial Times, nous avons demandé à des professionnels du marché des CGP de nous donner leur sentiment vis-à-vis de cette situation.
Suite à l’article « H2O Asset Management: illiquid love » paru sur le site du Financial Times (ftalphaville.ft.com) le 18 juin dernier au sujet des actifs illiquides détenus par la société de gestion fondée par Bruno Crastres, filiale de Natixis IM, fait l’objet de nombreux retraits sur l’ensemble de ses fonds, comme l’indique Morningstar qui a également suspendu temporairement la notation du fonds Adagio le 19 juin dernier, avant de revenir sur une notation abaissée à « neutre ». Si la société de gestion a communiqué régulièrement au sujet de ces positions non cotées et que son actionnaire soutient les mesures prises par la société de gestion, les doutes demeurent chez certains acteurs.
Notons également que, « dans ce contexte exceptionnel », Quantalys a sorti les fonds H2O de ses portefeuilles modèles par mesure de précaution.
Georges Nemes, président du groupement Patrimmofi
« Je suis furieux de cette condamnation médiatique dont fait l’objet H2O Asset Management et ses dirigeants. Et je le dis d’autant plus librement qu’aucun des clients de Patrimmofi n’a de fonds de H2O en portefeuille. Ni Bruno Crastres, ni H2O, ni Natixis ne sont devenus fous : ils connaissaient bien le passé du sulfureux Lars Windhorst. Lorsqu’on investit dans les fonds H2O, on connaît le potentiel de performance, mais aussi de volatilité : on est loin d’une gestion de type Serenipierre ou Capimmo ! Ont-ils pris trop de risques ? Je ne pense pas que les positions étaient démesurées lorsque l’article est paru, mais je crains que l’effet médiatique et moutonnier conduisent à ce que ces positions pèsent plus lourd et aggravent la situation… Et que dire de la chute du cours de l’action Natixis qui est “fascinante”, alors que la société de gestion de Bruno Crastres ne pèse finalement pas si lourd dans le bilan de Natixis… »
Guillaume Lucchini, président de Scala Patrimoine
« Dans le cadre de notre sélection de fonds, nous n’avions que très peu de fonds d’H2O en portefeuille. Nous avions vendu nos positions – à peine 3 % des portefeuilles – en début d’année. Cette situation est pour nous un cas d’école de la gestion du risque. En effet, si nous ne remettons pas en cause la qualité du gérant, nous restions frileux vis-à-vis de la gestion de la volatilité que les belles performances passées ne doivent pas masquer. Les due diligences que nous avons menées au sujet de la société de gestion, et que nous avons croisées avec celles d’autres sources, faisaient en effet ressortir des risques en termes de volatilité, mais aussi de transparence dans la valorisation des performances et dans la liquidité. »
Henry Masdevall, président du groupement Actualis Associés
« Au sein du groupement, nous avons échangé et continuons d’échanger sur ce sujet, alors que dans les portefeuilles de nos clients, les positions sur des fonds de la gamme peuvent aller jusqu’à 10 %. Pour l’heure, nous ne nous sommes pas précipités pour faire sortir nos clients des fonds de H2O dans la panique, même si cet épisode nous amène à nous poser des questions sur les performances passées. »
Anthony Cros, directeur de Cros Investing
« Pour nous, il ne s’agit pas d’une grande nouvelle car les équipes de H2O ont toujours été transparentes sur la composition des fonds. Pour autant, nous avons alerté nos partenaires au début du mois de Juin sur le fait que nous étions plus prudents sur ces fonds après avoir été très positifs lors des cinq dernières années. Cette prudence est liée uniquement à des questions de stratégies de gestion contraires à nos convictions. En effet, nous n’étions pas sur la même longueur d’onde que les équipes de Bruno Crastres sur plusieurs de leurs paris : positionnement fort sur les taux italiens (nous pensons que le potentiel de gain est plus derrière nous que devant), pari sur la hausse des taux allemands qui selon nous devraient rester bas, leur confiance envers la croissance américaine et le dollar lorsque nous sommes de plus en plus prudents. Concernant leur gestion actions value nous sommes également prudents en raison de leurs paris géographiques et sectoriels dont la gestion de la perte maximale n’a pas été satisfaisante selon nos critères.
Nous conseillons donc aux CGP d’alléger leurs positions sur les fonds H2O dans une stratégie de sécurisation des plus-values.
Enfin, nous identifions un dernier risque, si les marchés ne donnent pas raison aux équipes dans les prochaines semaines, on peut s’interroger sur la réaction de l’ensemble des investisseurs. Le risque est difficilement quantifiable et pourrait mettre une pression supplémentaire aux fonds H2O, même si ceci n’est pas notre scénario principal.»
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