Plafonnement des commissions Pinel : le décret vient de paraître
Après deux ans d’attente, la rémunération des intermédiaires distribuant des biens en loi Pinel sera finalement limitée à 10 % HT/TTC à compter du 1er avril. Le point sur ce sujet sensible…
Tout commence fin 2017, lorsque le Sénat vote un amendement surnommé « article 68 », modifié en décembre 2018 pour devenir le X bis de l’article 199 novovicies du CGI. Objectif : plafonner les frais et commissions des intermédiaires intervenant lors d’une acquisition de logement bénéficiant de la réduction d’impôt Pinel, afin d’éviter que les avantages fiscaux ne soient pas « captés par les intermédiaires qui s’octroient des marges entre 5 et 15 % du prix du bien », expliquait alors Albéric de Montgolfier, auteur de l’amendement.
Deux ans se sont écoulés avant que le décret fixant le niveau de plafonnement paraisse, le 20 décembre dernier. Entre-temps, différents taux avaient été évoqués, dont celui de 5 %, dénoncé comme mortifère par les professionnels de l’immobilier. Ce sera donc finalement le double. Le décret prévoit en effet que les commissions soient plafonnées à 10 % HT/TTC, et que soient inclus dans ce taux les frais directs et indirects liés à la vente du logement.
« On peut imaginer que l’objectif du législateur était de baisser les prix immobiliers. Ce ne sera pas le cas, car ce qui fait le prix de l’immobilier, c’est d’abord le foncier. Le plafond fixé par le gouvernement par décret est un taux de marché et si certains étaient légèrement au-dessus, la différence ira aujourd’hui dans le prix du foncier ou dans la marge du promoteur. En terme de prix, cela ne changera rien pour l’investisseur », déplore l’Anacofi.
« Il ne s’agit pas uniquement de plafonner le chiffre d’affaires des intermédiaires, mais également de rendre transparente la rémunération des intermédiaires auprès des acquéreurs », remarque de son côté Philippe Rochereau, président de l’AFIL. L’obligation d’information se situe en effet à la réservation et à l’acte. Elle est imposée aux seuls intermédiaires. « De quoi s’agit-il ? D’une atteinte au principe d’égalité bien sûr. D’une violation de la liberté d’entreprendre s’agissant du principe de plafonnement a fortiori. Dans un contexte de marché en baisse, est-ce bien raisonnable de chercher à déséquilibrer l’écosystème de la production de logements neufs ? », dénonce Philippe Rochereau, qui évoque 17 % de mises en commercialisation pour un besoin de 500 000 logements en plus par an et 7 millions d’habitants supplémentaires, d’ici 2040, du fait du célibat et du vieillissement.
« Si le décret précise le taux maximum et les modalités de la transparence dans les contrats de réservation et l’acte authentique, il reste extrêmement imprécis sur le périmètre des frais directs et indirects concernés ainsi que sur la manière de déterminer le coût moyen supporté par un lot en particulier dans l’opération », poursuit l’Anacofi qui regrette les difficultés de mise en œuvre du décret.
Son entrée en application est prévue le 1er jour du quatrième mois suivant sa publication, soit le 1er avril 2020. Mais la circulaire de mise en application du décret reste à rédiger. Plusieurs associations professionnelles ont d’ores et déjà annoncé leur intention de saisir le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat afin d’obtenir l’annulation des textes (articles de la loi et décret d’application), notamment pour d’inopérabilité et iniquité des textes. « Dans l’attente, nous allons devoir intégrer dans le contrat de réservation du promoteur, une clause qui indique le montant des frais de marketing et distribution et le pourcentage qu’il représente dans le prix de revient, précise-t-on à l’Anacofi. En outre, dans ce cas, il faudra ajouter que c’est un taux provisoire. Le taux définitif sera inscrit dans l’acte authentique mais qu’en cas de variation, il n’y aura aucun impact sur prix de vente. »
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