Les assureurs face à la révolution digitale
Sur les cinq années à venir, le Big Data, l’automatisation, la robotique et la télématique seront au centre des stratégies des assureurs. Selon une enquête Willis Towers Watson, cabinets de conseil, de courtage et de solutions logicielles, près de 50 % des assureurs comptent se doter de nouvelles technologies par le biais de fusions-acquisitions dans les trois prochaines années.
Contrairement à d’autres acteurs des services financiers, de nombreux assureurs se sont montrés plus réticents à adopter les technologies numériques, entre autres pour des questions de réglementation et de coûts. Aujourd’hui, ils sont de plus en plus nombreux à faire de la digitalisation une priorité, comme le révèle l’enquête menée conjointement par Willis Towers Watson et Mergermarket.
Des coûts importants, freins du développement
Elle conclut que, pour presque trois quarts des assureurs (74 %), le secteur n’a pas su être un pionnier de l’innovation liée au développement du digital. Les entreprises interrogées ont été confrontées aux coûts des transformations, attribuables notamment aux délais de commercialisation des nouvelles technologies (32 %) et au volume des investissements nécessaires (24 %).
Frédéric Traimond, directeur de l’activité Risk Consulting & Software South West Europe chez Willis Towers Watson, observe que « Les banques sont plus fréquemment en contact avec leurs clients, ce qui leur a donné une longueur d’avance. La fréquence, mais aussi la qualité des informations échangées entre les assureurs et leurs clients n’est tout simplement pas la même ; il arrive qu’ils ne soient en contact qu’une fois par an pour le renouvellement du contrat ».
« Les assureurs reconnaissent toutefois l’importance de disposer d’infrastructures digitales pérennes, notamment concernant les canaux de distribution et comme levier dans la gestion des clients. L’innovation interne, les joint-ventures et les fusions-acquisitions peuvent les aider à atteindre cet objectif. Quant à ceux qui hésitent encore, ils courent le risque de rester sur le quai et d’être délaissés par les jeunes et les futures générations, avec qui il est plus facile d’établir une relation via le numérique ».
La distribution, principale cible
L’enquête révèle que près de la moitié des entreprises interrogées (49 %) prévoient d’effectuer une acquisition au cours des trois années à venir dans l’optique de se doter de nouvelles technologies. Parmi elles, 14 % projettent même de procéder à plusieurs acquisitions.
Il ressort en outre que pour la quasi-totalité des répondants (94 %), la distribution sera la principale cible des transformations digitales dans les cinq prochaines années. Leurs priorités stratégiques seront également le traitement des réclamations, le règlement des sinistres et la gestion client.
« Les assureurs les plus innovants s’intéressent plus particulièrement à la digitalisation, de la distribution qui doit leur permettre de trouver de nouvelles voies d’accès au marché et de tisser des relations plus étroites et plus stables avec leurs assurés » explique Frédéric Traimond.
Le Web et les applications mobiles sont les canaux de distribution qui vont se distinguer dans les deux prochaines années, selon 77 % des assureurs ayant répondu à l’enquête. Sur les cinq années à venir, le Big Data, l’automatisation, la robotique et la télématique seront au centre des stratégies.
La digitalisation, un enjeu de taille
Les compagnies d’assurance voient dans la digitalisation un enjeu de taille, de même que l’opportunité de gagner en efficacité opérationnelle à tous les niveaux de l’entreprise, non seulement pour maîtriser les coûts, mais aussi pour rationaliser les processus et enrichir ainsi l’expérience client.
Pour Frédéric Traimond, « Les nouveaux outils et les technologies émergentes sont souvent très éloignés des méthodes de gestion classique des assureurs (comme la transformation numérique de la distribution par exemple). Intégrer des modèles d’innovation externes est probablement le seul moyen pour eux d’étendre leurs capacités digitales. Voilà qui pourrait donner lieu à une vague d’opérations de fusions-acquisitions dans les années à venir ».
Dans cette course à l’innovation figure également en bonne place le développement d’outils analytiques et de gestion des données, nombre d’assureurs interrogés assurant avoir déjà fortement progressé dans ce domaine. En effet, neuf assureurs sur dix (91 %) cherchent déjà comment collecter davantage d’informations directement auprès de leurs clients. Ils sont 79 % à tirer parti des données présentes sur les réseaux sociaux et plus de la moitié (53 %) à rechercher des moyens inédits d’exploiter les données accessibles au public.
Facteurs disruptifs
Quant à une transformation radicale du secteur, 45 % des assureurs interrogés pensent qu’ils seront les premiers à l’amorcer dans les années à venir, et ils sont tout autant à prédire qu’il faudra regarder avant tout du côté des start-up. Seuls 8 % considèrent que les nouveaux entrants du secteur technologique sont susceptibles de bouleverser l’ordre établi. Si les Google, Facebook et autres géants du numérique sont inévitablement désignés comme des facteurs disruptifs pour de nombreux secteurs d’activité, les assureurs se montrent, quant à eux, relativement optimistes face à la menace qu’ils représentent.
« Dans le contexte de faibles taux d’intérêt que l’on connait actuellement, les compagnies d’assurance doivent optimiser leurs marges en tirant de la valeur de leur modèle économique et accroître leur clientèle, des objectifs qui peuvent être atteints grâce aux nouvelles technologies », affirme Frédéric Traimond. Et d’ajouter : « Tout comme réinventer la façon dont les entreprises font des affaires est essentiel pour stimuler l’innovation produit, investir dans la relation avec les futures générations d’assurés sera essentiel pour augmenter les marges bénéficiaires».
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