Et s’il fallait revoir à la hausse les prévisions de croissance en zone euro ?
Par David Kalfon, CFA, président-fondateur d’Amaïka AM
Mario Draghi et Jean-Claude Juncker semblent s’être donné le mot pour adresser un message d’espoir aux marchés financiers et faire taire les eurosceptiques.
En l’espace de moins d’une semaine, le patron de la BCE s’est dit prêt à « recalibrer l’ampleur, le rythme et la composition » de ses achats si cela devait s’avérer nécessaire, relayé dans sa quête de confiance, par le président de la Commission européenne, qui vient de dévoiler son projet d’allouer 315 milliards d’euros à la relance économique européenne. « Nous lançons un plan d’investissement offensif. Il s’agit d’une initiative majeure pour permettre à l’Europe de renouer avec la croissance et l’emploi », s’est félicité Jean-Claude Juncker, qui prévoit de consacrer, d’un côté, 240 milliards d’euros aux investissements d’infrastructures et 75 milliards au financement des PME.
315 milliards, une goutte d’eau ?
A première vue, on peut s’interroger sur l’efficacité potentielle de ces mesures qui ne seront mises en œuvre qu’à compter du deuxième semestre 2015. Les 315 milliards d’euros du programme sont bien peu de chose rapportés aux 19 000 milliards d’euros de PIB de l’Union européenne. Qui plus est, ces 315 milliards prennent en compte une large participation du secteur privé, ce qui, à l’heure actuelle, n’est pas encore acquis. Il aurait été bien plus simple d’investir directement ces montants en finançant le tout par la banque européenne d’investissement, quitte à ce que celle-ci se refinance auprès… de la BCE ! Le schéma retenu est donc conditionnel, un peu plus complexe et d’envergure limitée.
Un petit pas pour la croissance, un grand pas pour la construction de l’Europe
Pour autant, ne mettons pas trop vite de côté la force du symbole. Il s’agit là d’un petit pas pour la croissance économique, mais probablement d’un grand pas pour la construction de l’Europe. Alors que ces dernières années, Bruxelles a été de plus en plus considérée comme une source de sanction et d’austérité, la perspective de voir les Etats membres se ressouder autour d’un projet commun de relance économique par l’investissement est plutôt rassurante. D’autant qu’après l’AQR et les opérations de TLTRO, les banques sont suffisamment bien dotées pour contribuer à l’effort de financement du plan Juncker.
Un facteur de soutien pour les marchés
Au moment où l’un des plus grands risques pour l’Europe est la montée des eurosceptiques, il est important de donner une autre image de Bruxelles. Le plan Junker y contribue et constitue un pas en avant sur la longue route de la construction européenne. Même si une grande partie des projecteurs resteront braqués sur les actions de la BCE l’an prochain, ces nouvelles mesures de relance économique devraient alimenter, à partir de juin 2015, un flux de nouvelles positives susceptible de constituer un facteur de soutien pour les marchés.
Le consensus de croissance pour la zone euro en 2015 est très dégradé (+ 1,2 %). Si on cumule les facteurs positifs récents (baisse de l’euro, baisse des prix du pétrole, soutien de la BCE et plan Junker), on peut se prendre à espérer pour la première fois depuis trois ans, une révision à la hausse de cette prévision de croissance. Il est fort à parier qu’une telle révision prendrait de court bon nombre d’investisseurs…
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